Le ministre de l’Intérieur a répondu au député de Mayotte Ibrahim Aboubacar. L’échange porte sur la «consolidation d’un Islam de France» et la participation de Mayotte dans le débat.
Si Mayotte n’en finit plus de tenter de retrouver un rôle à ses autorités cadiales, pour le ministère de l’Intérieur, leur place dans la société mahoraise ne fait aucun doute. Bernard Cazeneuve va même au-delà, en espérant qu’ils seront «d’une indispensable contribution» au moment où le gouvernement entend consolider un «Islam de France».
Le ministre de l’Intérieur a lancé, le 25 février dernier en Conseil des ministres, la réforme du culte musulman en France. Le gouvernement souhaite reprendre la main et apaiser la situation alors que la représentation institutionnelle de l’Islam est critiquée, que les appels au débat face aux phénomènes de radicalisations se multiplient et que les actes islamophobes en métropole atteignent des records.
Le ministre veut rapidement mettre en place «une instance de dialogue» appelée à se réunir deux fois par an autour du Premier ministre. L’idée est de «discuter de questions très concrètes qui sont autant de sujets de préoccupation pour les Français musulmans». Ce travail serait une base pour refonder le Conseil français du culte musulman (CFCM).
Mayotte, un exemple du vivre ensemble
Si l’’Etat «n’a pas vocation à organiser le culte musulman», reconnaissait le ministre, «il doit fixer des objectifs et des principes». La formation des imams et des aumôniers aux principes de la République serait ainsi facilitée en développant les diplômes universitaires de formation civique et civile, qui passerait de six à une douzaine. «Nous devons faire de l’obtention de ces diplômes la condition de recrutement des aumôniers dans les prisons, les hôpitaux et les armées», avait indiqué le ministre.
Immédiatement après ces annonces, le député Ibrahim Aboubacar avait pris son clavier pour dire sa «très grande satisfaction» face aux mesures annoncées. Rappelant la singularité de Mayotte, «seul territoire de la République où une très large part de la population est de confession musulmane», il avait indiqué au ministre de l’Intérieur que «divers acteurs représentatifs du culte musulman à Mayotte sont impatients de s’inscrire dans ce dialogue.» Pour le député, pas de doute, «il serait juste et pertinent de faire de ce territoire de la République, un exemple de ce qu’il est possible de construire ensemble».
Combattre les dérives
Alors que l’Islam pratiqué à Mayotte, « sunnite, de rite chaféite», est «modéré et soucieux de s’inscrire dans la République», le député avait souligné les «efforts déployés depuis plusieurs années par les cadis de l’île pour combattre les dérives qui apparaissent ici et là».
Dans son courrier, le ministre de l’Intérieur semble sur la même longueur d’onde, confiant qu’il n’a «pas manqué de relever qu’au lendemain des actes barbares qui ont endeuillé notre pays en ce début d’année, c’est par des déclarations fortes que le Grand cadi mahorais a immédiatement fait part de sa réaction en dénonçant ‘le crime perpétré (…), l’une des plus horribles agressions portées contre la liberté d’expression, une valeur profonde et fondatrice de l’Islam’».
Cette réponse du ministre de l’Intérieur semble donc indiquer que les cadis auront une place dans cette large consultation sur l’Islam. Ce serait alors la première fois que le quotidien de Mayotte s’intègrerait pleinement à un débat de société à l’échelle nationale.
RR
Le Journal de Mayotte
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