Cette nuit, un nouveau naufrage a endeuillé les îles d’Anjouan et Mayotte. Sans que l’on sache vraiment estimer le nombre de bateaux qui arrivent sur l’île, ni chiffrer le nombre de décès. Nous avons obtenu malgré tout des précisions sur les circonstances du naufrage.
L’insoutenable en matière d’immigration, ce n’est pas seulement sur les côtes turques, c’est aussi à Mayotte que cela se passe. Les statistiques macabres du passage de 40 miles (70km) qui séparent Anjouan (Grande Comore) de Mayotte se sont encore alourdies cette nuit. De combien ? Difficile de le savoir.
Insoutenable, car ces décès par noyade sont le quotidien de notre île, «un marronnier* pour les journalistes», comme le disait cyniquement un habitant.
A 19h30 : Un de rescapé (un second était peut-être localisé par la gendarmerie ce soir), évoque 29 ou 31 passagers dont une quinzaine de femmes et environ 8 enfants. Trois corps ont déjà été sortis de l’eau par la gendarmerie ce lundi matin, “une femme de vingt ans et deux enfants retrouvés par la brigade nautique de la gendarmerie”, a déclaré le procureur Joël Garrigue à l’AFP. Les médias ont reçu dans la soirée un Communiqué du préfet sur le naufrage du kwassa ainsi qu’un Communiqué de la ministre des Outre-mer.
«D’autre part, nous avons récupéré 8 personnes cette nuit, sans que l’on sache si elles étaient rescapées du naufrage. Elles n’ont rien mentionnées, et n’étaient pas spécialement trempées», signale Jean Gouvart, le colonel de gendarmerie de Mayotte. Manquent toujours entre 17 et 19 personnes.
Une barque cherchant de la drogue
Autre précision, selon les dires du rescapé, interrogé par nos confrères de Mayotte 1ère, le kwassa (bateau) aurait été approché par une barque réclamant de la drogue. Face à la réponse négative des passagers et du passeur, la barque aurait fait demi-tour en provoquant un tel remous que le kwassa aurait chaviré.
Les services de l’Etat s’arrachent les cheveux à l’heure de compiler les données pour établir un bilan sur une longue période. Difficile de savoir combien de personnes sont décédées, les rescapés, migrants illégaux qui atteignent la terre, ne se faisant bien évidemment pas connaître. La Cimade publiait une estimation en mai 2012: «Depuis 1995 et l’instauration du ‘visa Balladur’, on estime à plus de 7.000 le nombre de personnes ayant perdu la vie en tentant la traversée pour Mayotte.»
21 kwassas en détresse secourus en 2015
Selon les chiffres de l’Etat major de sécurité, en 2014, 19.991 personnes ont été reconduites à la frontière, dont 60% d’interception en mer, c’est à dire 12.879 passagers de kwassa. Ce sont 752 kwassas qui ont été interceptés en 2014. On sait que pour un kwassa intercepté, ce sont trois ou quatre qui arrivent à passer entre les mailles des quatre radars de l’île.
Et cette année, 21 kwassas en détresse auraient été repérés par les radars de Mayotte et secourus depuis le début de l’année par les forces françaises de défense et de sécurité.
A Mayotte, seuls les proches seront endeuillés, le reste de la population demeurant hostile à l’arrivée de ces populations accusées d’engorger hôpitaux et écoles. Le supportable est atteint quand on sait que beaucoup de ces personnes viennent pour des raisons médicales, quand l’Etat français avait officiellement annoncé avoir mis en place des visas sanitaires. «C’est très difficile là-bas de les obtenir, il faut souvent payer», nous avait indiqué un migrant. Un lecteur publiait d’ailleurs sur la page Facebook du JDM une caricature de l’Etat comorien, obèse bénéficiaire des ressources financières.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* Un sujet qui revient de façon cyclique
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