Plusieurs pièges peuvent attendre les élus qui vont unir leurs communes pour le meilleur de l’intercommunalité, mais on le souhaite, pas pour le pire. Comme les tentations de recrutements de complaisance. Mais le problème majeur demeure le SIDEVAM 976 déficitaire. Les parlementaires pourraient être sollicités.
Le docteur Ramlati Ali, déléguée régionale du CNFPT (Centre national de la fonction publique) Mayotte, détaillait plusieurs écueils possibles pour le navire intercommunalité dans son allocution lors de la formation des élus et cadres sur ce sujet à Sakouli.
Si elle se disait convaincue que « ce qui unit les collectivités mahoraise est plus fort que ce qui les divise », elle mettait en garde contre la « dramatique erreur » qui consisterait à y voir une manne à l’emploi de complaisance, « à nouveaux recrutements, aggravant ainsi la situation financière des collectivités. »
Guy Durand, professeur de droit public et ancien maire de Millau (Midi Pyrénées), qui a déjà assuré quatre formations des cadres des mairies de l’île, « de très bons DGS », rappelait que la communauté de communes devait être un outil au service de l’investissement, « il faut préparer l’avenir de Mayotte ». Répondant à notre interrogation sur les contrôles éventuels contre tout emplois abusifs, il met toute sa conviction dans les explications fournies aux DGS : « ils ont bien compris comment faire marcher correctement une intercommunalité, et nous diffusons aujourd’hui le message aux élus. »
Garder uniquement les recettes
La loi NOTRe, pour « Nouvelle organisation territoriale de la République », donne à ces communautés une fiscalité propre, qui assure une partie des recettes de la structure. D’où un risque : « au lieu de mutualiser les moyens, les communes en difficulté pourraient être tentées d’inscrire les dépenses au budget de l’intercommunalité, et de n’en garder que les recettes. » Recettes faites d’une dotation globale de l’Etat, et d’un choix entre taxer un peu plus les ménages, ou de basculer la Contribution des entreprise vers les communautés de communes.
Un choix cornélien, « car vous démarrez votre fiscalité de droit commun avec des bases d’imposition mal calculées par l’Etat », commentait le professeur Durand, en évoquant les récentes augmentations d’impôts locaux.
« Des cotisations six fois plus élevées que les recettes »
Mais le point le plus débattu était le syndicat intercommunal d’élimination et de valorisation des déchets de Mayotte, le SIDEVAM 976. En allouant brutalement la compétence de la collecte et du traitement des déchets aux intercommunalités qui n’ont pas même encore vues le jour, « le législateur ne vous a pas fait de cadeau ! », s’exclamait Guy Durand. Car le syndicat est très déficitaire à Mayotte, « il serait dommage de plomber aussitôt vos nouvelles structures », mettait-il en garde.
Dès le 1er janvier, les conseillers communautaires vont remplacer les conseillers communaux au sein du SIDEVAM, « qui deviendra du coup un syndicat mixte, une évolution qui impose au préfet d’en modifier les statuts », indiquait le juriste.
Mais il faut en amont se poser les bonnes questions. Ce qu’a fait le DGS de Chirongui : « les charges du SIDEVAM sont énormes pour des recettes moyennes. Les cotisations sont en moyenne 6 fois plus élevées que les recettes. La commune devra forcément apporter une compensation au Syndicat. » Un raisonnement qui incite à pousser jusqu’à s’inerroger sur la restructuration préalable de syndicat déficitaire, « en métropole, les recettes dont la collecte de la Taxe d’enlèvement des ordures ménagères, couvrent la dépense. Vous en êtes loin », rajoutait Guy Durand.
Qui glisse une proposition : « il faudrait interpeler vos parlementaires pour demander de différer la compétence des déchets à 2017. »
Les quatre années de progression vers des intercommunalités pleines et entières en 2020 pourraient ainsi être mises à profit pour entrer dans les clous.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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