La numéro 2 du ministère de l’éducation nationale a passé 3 jours à Mayotte. La directrice générale de l’enseignement scolaire revient sur les budgets, le personnel et les méthodes d’apprentissage, en particulier dans le 1er degré.
Elle s’occupe de tous les enfants de France et logiquement elle est venue à Mayotte pour «voir à quoi ressemblent les chiffres et les notes que le vice-rectorat (lui) envoie régulièrement», pour mettre du concret sur ce département qui tranche dans la masse de données du ministère de l’éducation nationale. Florence Robine, directrice générale de l’enseignement secondaire, avait aussi intégré Mayotte dans sa tournée pour expliquer la réforme du collège dans laquelle elle est particulièrement impliquée.
«J’ai trouvé des enseignants motivés, très en avance sur la métropole dans leur réflexion pédagogique et leur capacité à travailler ensemble», relève-t-elle. Car si les défis de l’enseignement à Mayotte sont «immenses», la N°2 du ministère est lucide sur le constat mais optimiste.
«Ma visite correspond à un moment intéressant», note Florence Robine. «Dans 15 jours, c’est le dialogue de gestion, le moment où toutes les académies présentent un état des lieux, un bilan du travail engagé et les axes du travail pour l’année à venir». C’est donc le moment où le ministère tranche la question de la répartition des moyens, pour qu’elle soit «équitable»… Et Florence Robine affirme que «Mayotte n’est pas hors de vision de Paris», loin de là.
«Actuellement, quand on construit un budget, on sanctuarise d’abord les budgets pour Mayotte», affirme la directrice générale. Et de fait, ce sont 60 millions d’euros qui sont injectés dans les constructions pour tenter de répondre à l’enjeu de la scolarisation des jeunes mahorais dans de bonnes conditions.
Les murs, les personnels, les méthodes
Et toutes les questions s’entremêlent. Il y a celles du bâti, Florence Robine a inauguré le collège de Kwalé et a visité le chantier de celui d’Ouangani… «Il faut que les conditions pratiques des apprentissages soient là». La rénovation de classes faisait aussi partie de son programme de visite.
Il est aussi question du personnel : «Il faut des enseignants bien formés» et «il faut que les gens restent». Clairement, le ministère sort de la logique qui consiste à attirer à coup de primes des fonctionnaires qui vont rester deux ans. «Les gens qui viennent et restent doivent apporter leur expertise et nous devons travailler à former ceux qui sont là, élever le niveau des contractuels qui ont besoin d’être accompagnés et formés… Mais concernant les contractuels, le niveau de recrutement n’a jamais été aussi élevé», note Florence Robine.
Interrogée sur l’échec du 1er degré, avec un niveau d’acquisition en particulier en langue toujours globalement faible, c’est la vice-recteur qui prend la parole et répond sans détour: «Si on n’arrive pas à apprendre le Français, c’est qu’on s’y prend mal. Nous avons organisé des formations au plus près de la classe pour que les formateurs puissent identifier les problèmes et travailler sur ces situations», rajoute Nathalie Costantini, la vice-recteur de Mayotte.
«Il est important d’avoir des gens qui maîtrisent la langue à un haut niveau pour faire des passerelles. En Guyane, depuis 3 ou 4 ans, nous avons les 1ers amérindiens, des gens du fleuve, qui décrochent les concours de profs des écoles», se félicite Florence Robine qui fut rectrice de l’académie guyanaise.
D’une langue à l’autre
Quant au bilinguisme des premières années de scolarité dans lequel beaucoup fondent de l’espoir, la question demeure «délicate» pour Florence Robine qui cite tout de même l’exemple d’éveils aux langues dans lesquels les enfants jonglent avec le Français, l’Anglais, le Mahorais, le Kibushi et l’arabe… «Les enfants ont acquis des compétences en langue incommensurables et qu’on n’arrive pas à en tirer profit, ça m’échappe…»
Là encore, ce qui est fait en Guyane pourrait servir de point de référence. «Dans des classes d’immersion, les premiers apprentissages sont en langue locale et on passe progressivement à la langue française. Ça permet de stabiliser les acquis des enfants dans leur propre langue et de faciliter le passage vers le Français».
Florence Robine pointe le développer de la recherche et de la réflexion sur cette question linguistique pour disposer d’un corpus pour, par exemple, transmettre aux enfants les notions de genre, de temps ou de nombre propres à chaque langue.
Enfin, même si le niveau de réussite au bac à Mayotte reste 20 points en dessous de celui de métropole, Florence Robine invite à «arrêter de se comparer en permanence», pour «ne pas décourager les gens» mais aussi parce qu’il ne faut pas oublier d’où on vient. La première école maternelle à Mayotte a été ouverte en 1994. «En matière d’éducation, les temps sont longs. Tous les efforts que l’on fait aujourd’hui vont donner des résultats dans 10 ans», note Florence Robine. 2025, décidément, semble être l’horizon vers lequel regarde Mayotte.
RR
Le Journal de Mayotte
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