Le pôle santé publique du CHM* organisait un séminaire destiné aux professionnels de santé du département ce vendredi. Objectif : sortir pour quelques heures de la gestion permanente de l’urgence.
Depuis toujours, la «santé publique» se vit comme le parent pauvre des politiques sanitaires. Et malgré la réaffirmation d’Etienne Morel, le directeur du CHM, «d’une attention particulière» pour que le pôle continue de se développer, dans ses services comme dans tout l’hôpital, on est au bord de l’asphyxie.
Alors que l’activité de la maternité est hors contrôle et va dépasser de façon certaine les 9.000 naissances cette année… les conséquences impactent l’ensemble du CHM. Pour le pôle santé publique, ce sont plus de 9.000 vaccins du BCG à faire aux nouveau-nés, et 27.000 vaccinations et rappels contre l’hépatite.
«Un hôpital qui ne fait que de l’urgence, c’est quelque chose de grave parce que la prévention et les actions de santé qui ne sont pas menées aujourd’hui, c’est à nouveau un surcroît d’activité demain», relève Anne-Marie de Montera, la chef du pôle santé publique du CHM.
Mais que faire face à une activité de l’hôpital qui explose, avec une progression attendue de plus de 20% d’une année sur l’autre, et un nombre de séjours qui passerait de 30.046 en 2013 à plus de 39.000 en 2015?
Manque de professionnels
Certes, la prévention coûte de l’argent, mais on sait qu’elle en fait gagner beaucoup par la suite… A condition d’avoir les moyens de la mener à bien, et en particulier les moyens humains. Or, partout, les difficultés de recrutement et le faible nombre de postes touchent lourdement les actions de santé : on comptabilise 2 médecins à l’éducation nationale pour 90.000 élèves, 6 équivalent temps plein en PMI, un seul médecin chez les pompiers… et un tiers des postes non pourvus à l’hôpital. Rien que dans la pôle santé publique, les 11 postes de médecins n’ont pas tous trouvés preneurs.
Et pourtant. Dans ce pôle, comme ailleurs, où que l’on regarde les services sont asphyxiés. Par exemple, concernant l’hémovigilance et la sécurité des transfusions, la consommation des produits du sang a doublé depuis 2010.
Au centre de lutte anti-tuberculose (CLAT), le nombre de cas reste autour de la trentaine chaque année (34 en 2014) mais avec 75% de cas importés. Le caractère très contagieux de la maladie oblige à chaque fois une recherche des contacts puis un suivi sur 2 ans. Ce sont actuellement plus de 240 personnes qui sont concernées.
Partout, toujours plus
Du côté de la lutte contre la lèpre, le nombre de patients est passé de 34 en 2012 à 54 en 2014 avec une file active de 154 patients. Pas question de prendre le sujet à a légère, les formes les plus contagieuses (multi-bacillaires) prédominent avec 120 cas. 37% des cas sont importés sans que l’on puisse savoir de quoi demain sera fait. Le temps d’incubation de la lèpre est de 2 à 10 ans.
Pour l’activité du centre de dépistage anonyme et gratuit, les chiffres sont également impressionnants avec par exemple 2.700 sérologies à l’hépatite B recherchées (31 finalement positives) en 2014. On peut aussi citer plus de 1.900 de recherche de VIH, 1.800 de syphilis.
Enfin, le centre de vaccination et de conseil aux voyageurs ne désemplit pas non plus à Jacaranda avec 9.724 consultations vaccinales en 2014, sans parler de ses campagnes de vaccination gratuites de proximité (38 sorties pour 2.162 consultations).
Des projets malgré tout
La journée de vendredi avait donc pour objectif de prendre un peu d’air, présenter les actions du pôle, de diffuser des informations (comme ce fut le cas sur l’addictologie et la «chimique» en particulier) et permettre des rencontres entre des professionnels happées par le flux de patients. «Quand les gens se connaissent, c’est plus facile de travailler en amont», réaffirme de Anne-Marie de Montera, citant les PMI ou l’éducation nationale qui étaient présentes.
Et malgré la masse, le pôle a toujours des projets dont, par exemple, le développement de la dermatologie. Car outre les secteurs en urgence permanente, il y a aussi ceux qui n’existent quasiment pas, faute de postes pourvus.
RR
Le journal de Mayotte
*Les huit pôles du CHM : Santé publique, gynéco-maternité, pédiatrie, BACS (bloc, anesthésie, chirurgie, spécialités), MPRU (médecine, psychiatrie, rééducation, UCSA), médecine secteurs, médico-technique (radio, labo, pharmacie), URSEC (urgence, réanimation, Samu, évasan, caisson hyperbare).
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