Ericka Bareigts avait débuté sa journée de vendredi par un déplacement à une heure de route de Mamoudzou, dans “la commune la plus à gauche de Mayotte”, comme se plaît à la présenter son maire PS Darouechi Ahmed. Qui a livré en guise d’accueil un vrai discours politique, autant sur l’échiquier des partis, que dans les orientations à donner au développement de Mayotte.
“C’est une fierté jubilatoire que de vous recevoir madame, seule femme ministre socialiste de la zone océan Indien, véritable combattante de gauche”, le ton était donné, Ericka Bareigts buvait du petit lait, alors que le maire rajoutait que “des parlementaires de notre famille politique devraient s’en inspirer”.
Les difficultés des Outre-mer en général, et de Mayotte en particulier, faisaient l’objet d’une vive critique de l’élu qui les mettait en lien avec une démission de l’Etat: “l’éducation au rabais, le chômage de 60%, l’immigration incontrôlée et incontrôlable, l’illettrisme, les infrastructures routières indignes… Où sont les ingénieurs issus des grandes écoles? Quand on voit leur travail ici, on se pose des questions !”
“Les lumières se sont-elles éteintes ?”
Et de s’interroger sur les raisons d’une telle mise au banc: “On paie notre choix tardif d’appartenance à la patrie des lumières ? Et les lumières se sont-elles éteintes en France ?! Nous sommes un panier vide d’une départementalisation mal préparée, fustige la Cour des comptes. La population est déboussolée par le sort que lui réserve la mère patrie.”
Surfant sur le thème identitaire à la mode, Darouechi en prend le contrepied, “Nos ancêtres ne sont peut-être pas Gaulois, mais nous sommes fiers de nos origines qui nous portent à la tolérance.”
Il conclura sur la difficulté de faire entendre et prendre en charge nos problématiques :”Mayotte est petite, et la France est grande. Mais avec une réelle volonté de faire, Mayotte peut devenir un bijou attractif dans l’océan Indien”, et, reprenant le cheval de bataille de l’Egalité réelle d’Ericka Bareigts, “A quand un développement réel de ce territoire ?! Toutes les communes souffrent d’avoir la même fiscalité et les mêmes rythmes scolaires qu’en métropole.”
Bien que sa prise de parole n’était pas prévue, la ministre ne pouvait que réagir, “j’admire votre détermination, vous le maire qui êtes à portée de claque”, dit-elle en simulant une gifle à l’adresse de Darouechi Ahmed, “premier destinataire des critiques de la population”. Utilisant une expression réunionnaise, “Ti hache y coupe gros bois”, pour souligner qu'”il faut se méfier du plus petit que soi”, la ministre jouait elle aussi sa partition politique en critiquant “certains avaient oublié Mayotte, qui a accumulé tellement de retards qui ne peuvent pas être rattrapés instantanément. J’ai justement décidé de me déplacer à Mayotte pour voir la réalité.”
Mayotte qui fut la destination de son voyage de noce, il y a 20 ans.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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