Sécuriser les recettes des collectivités locales tout en ne suscitant pas une pression fiscale supplémentaire : une équation que permet de résoudre, par diverses formules, l’octroi de mer.
La nouvelle taxe à laquelle est soumise Mayotte en tant que territoire douanier de l’Union européenne, nous vient de 1670, du temps où tous les produits arrivaient par la mer.
L’octroi de mer s’applique sur les importations de marchandises, comme feue la taxe à la consommation et, fait nouveau, sur la production intérieure pour toute entreprises au chiffre d’affaire supérieur à 550.000 euros*. Cette dernière se nomme logiquement octroi de mer interne, alors que la première qui taxe les produits entrant sur le territoire, l’octroi de mer externe. Le taux appliqué à un produit doit être le même qu’il soit fabriqué localement ou importé.
Cependant, pour soutenir la production locale soumise aux handicaps de l’éloignement qui majorent les prix de revient des produits qu’elle fabrique, il est possible d’appliquer un différentiel. En fonction des secteurs à soutenir, le Conseil général a donc établi 3 listes, A, B et C qui permettent d’aller jusqu’à appliquer un taux zéro d’octroi de mer interne sur un produit.
Manque de données
C’est cette taxation que vont voter les élus en Séance plénière jeudi 6 février, sans avoir toutefois l’aval total de l’Union européenne qui n’a validé que 60% de la liste. «Nous manquons de données fiables pour étayer nos demandes», se plaignaient les membres du Conseil Economique Social et Environnemental (CESEM), réunis ce mardi après-midi en assemblée plénière. Encore une fois l’INSEE était pointé du doigt.
Dominique Marot, vice président de la Chambre d’Agriculture et de la Pêche, prenait un exemple : «les œufs seront taxés à 25% à l’importation et en production locale. Pour alléger cette dernière, nous devons fournir les preuves que les œufs importés de La Réunion mettent en péril les nôtres !» Chose impossible par l’absence de données, selon lui. Et ce qui pourrait provoquer une invalidation de l’Europe.
Les enjeux ne souffrent pas la précipitation
En 2014, ce seront 70 millions d’euros qui seront ainsi perçue par la direction des Douanes qui devra les redistribuer pour partie vers les communes (30 millions d’euros) et pour l’autre vers le Conseil général.
Pour les membres du CESEM, la fixation des taux par l’Etat, en dernière limite le 30 décembre 2013, est le reflet d’une politique à la petite semaine, «une vision comptable et non au service du développement économique du territoire». Ils appellent à la création d’une Cellule “Octroi de mer” au Conseil général composée de spécialistes et ouvertes aux associations professionnelles et de consommateurs.
Justement, et dans une logique de stratégie de développent du territoire, le président Zaïdani annonçait son intention de proposer au CESEM d’élaborer un document de stratégie sociale et fiscale… Un manque de concertation justement dénoncé par Abdou Dahalani, président du CESEM.
Bien que la taxe en local ne touche pas les petits commerçants, le président du Conseil général connaît les enjeux d’une taxation qui peut se répercuter sur les prix à la consommation dans un département où la vie chère a eu ses émeutes : «En tant que “départementalistes”, les élus du Conseil général souhaitent que l’évolution de la fiscalité ne fasse pas regretter ce changement de statut à la population…»
Anne Perzo-Lafond
* Le seuil de chiffre d’affaire pourrait être abaissé à 300.000 euros en juillet 2014 selon le CESEM
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