« Nous avons noté un déficit de réflexion panoramique, globale sur les îles », explique Buata Malela, Maître de conférences en Langue et littérature française et francophone au Centre Universitaire de Mayotte. Il développe depuis la création du CUFR son axe de recherche sur l’étude des littératures francophones de Mayotte, et avait proposé en 2015 le thème « Littératures francophones des Comores, de Mayotte et du sud-ouest de l’océan Indien ».
Il a cette fois élargi son champ en proposant un Colloque international sur « Les représentations sociales des îles dans les discours littéraires francophones : du voyage à l’utopie. » (Lire le Programme colloque mars 2017 brochure)
Il se tient pendant deux jours au CUFR avec un programme si dense que le débit de parole des conférenciers s’en ressent. C’est ainsi que ce mercredi matin, Ute Fendler, Université de Bayreuth, développait au pas de charge son argumentaire sur les « Imaginaires des îles, imaginaires cosmopolites », suivie par Valérie Magdelaine-Andrianjafitrimo, Université de La Réunion, sur « Nostalgies coloniales et exil paradoxal : la mémoire d’une île française dans une île anglaise à travers quelques textes mauriciens ».
Un mouvement littéraire uniforme
A propos de l’île Maurice, elle retraçait comment la littérature post coloniale française, traduisait la nostalgie de ce monde perdu. « Il y a un rejet du passage de l’île hors tutelle de la France, lorsqu’elle fut cédée à l’Angleterre par le traité de Paris en 1814. On note un vaste mouvement francophile dans la littérature de la fin du 19ème siècle ».
C’est la que la littérature joue sur l’imaginaire collectif, « on légitimise la présence française, sans jamais la remettre en question, et on ne parle pas de colonisation. »
Celle qui s’est longtemps appelée Ile de France « reste un morceau de cette France. » L’arrivée des Anglais est perçue comme un drame intime, « un arrachement au territoire. » La chercheuse utilise cet argument pour avancer dans l’ouvrage étudié, l’absence de description des paysages, du territoire tout court.
Les visions de l’écrivain et du politique
Le symbole de Maurice française reste le roman de Paul et Virginie, dont on imagine la couleur tricolore du drapeau que symboliserait le naufrage.
Il y aurait donc un refus de prise en compte du réel, qui ne reviendrait que par le corps de femmes, qui, par leurs relations extra-maritales, « s’ancrent sur le territoire, quand leurs maris et pères restent tournés vers l’océan. »
On le voit, l’île donne à rêver, à interpréter, aux écrivains, mais aussi ceux qui les étudient, pour le plus grand bonheur de ceux qui débattent ensuite. Buata Malela s’exprime sur cette intentionnalité de l’écriture : « Les écrivains proposent une lecture de l’île à travers leur sensibilité, qu’on ne retrouve pas chez les politiques. La littérature a quelque chose à dire ». Il annonce une publication ultérieure.
Il ne faut en tout cas pas sous-estimer l’influence de la littérature, et on se prend à rêver du jour où les écrivains Mahorais nous représenteront massivement au Salon du Livre de Paris.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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