Un état des lieux de la Cour des Comptes pointe les insuffisances des politiques publiques des collectivités. Mais ses préconisations n’apportent pas de rupture avec les outils habituels.
La Cour des Comptes vient de publier son rapport public annuel de trois tomes qui retracent ses observations, ses recommandations, les suites à donner et ses activités en 2013.
L’un d’eux concerne le tourisme en Outremer, au sous-titre évocateur d’«Un indispensable sursaut». Trois départements où le tourisme participe à l’activité économique sont ciblés : la Guadeloupe, où il représente 7% du PIB (Produit Intérieur brut), la Martinique, 9%, et La Réunion, 2,6%, et également la Polynésie française, 7,7%. A Mayotte, le rapport fait observer «un développement touristique encore limité».
Une vérité qui ne doit pas empêcher de regarder de prés les critiques formulées sur ces territoires dont le développement touristique était en expansion dans les années 90.
Le contrôle porte sur les politiques touristiques conduites par les principaux acteurs locaux sur la période 2006-2012. Tout en soulignant des facteurs aggravant comme la crise sociale de la cherté de la vie de 2009 aux Antilles «qui a conduit à l’annulation de prés de 10.000 séjours», l’épidémie de chikungunya en 2006 à La Réunion suivie par «la crise requin», ces destinations sont concurrencées par «les îles concurrentes en concordance avec le dynamisme du tourisme international qui a crû de 4% en 2012».
Mais ce sont les politiques publiques qui sont en cause : «des interventions peu dynamiques des collectivités et, de façon générale, une action publique souvent inefficace. Ces îles n’ont pas su mettre en place une stratégie touristique innovante.»
Les offres combinées du concept Iles Vanilles «peinent encore à se matérialiser dans les taux de fréquentation en raison notamment des différences dans les réglementations relatives aux visas et au fait que les partenaires sont également des concurrents».
Focus sur l’aérien
Est aussi pointée du doigt une desserte aérienne peu diversifiée, «les touristes européens désireux de se rendre aux Antilles ou à La Réunion sont contraints de passer par Paris» et pourrait-on rajouter, ceux qui se rendent à Mayotte ont une escale supplémentaire à La Réunion ou Madagascar. Les tarifs de l’aériens «élevés» sont surtout critiqués pour «les écarts de prix pouvant aller du simple au double en période de vacances scolaires».
Les recommandations pour corriger cet échec, sont au nombre de huit. Les deux premières appellent à l’élaboration de plan stratégique et de plan d’actions opérationnelles… ce que n’ont cessé de produire ces territoires, avec une efficacité apparemment modérée. Les suivantes appellent à davantage de coordination entre les acteurs et la mise en place d’une politique de formation. Il est également préconisé de définir des pays cible prioritaires, action que le Comité de Tourisme de Mayotte vient de mettre en place avec la clientèle allemande. Rien de très novateur donc en dehors de la mise en place d’un guichet unique d’aide aux établissements hôteliers.
On entend de nouveau parler de la suppression des défiscalisations «Girardin», «pour les remplacer par d’autres modes d’intervention moins coûteux pour le budget de l’Etat et plus efficaces». Sur ce dernier point, le ministre de l’Economie et des Finances répond qu’un crédit d’impôt s’y substitue partiellement depuis cette année.
Destinataires du rapport, les compagnies aériennes ont également adressé une réponse : «Trop cher par rapport à qui ? A quoi ?» interroge le président directeur général de Corsair pour souligner l’insuffisance d’arguments contenus dans le rapport, alors que Air Austral met en cause les taxes aéroportuaires, «107 euros sur un prix de billet de 300 euros», et qui peuvent tripler en fonction de la saisonnalité du trafic.
Chacun doit donc balayer devant sa porte et intégrer ses impératifs dans une vaste stratégie régionale.
Anne Perzo-Lafond
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