Nouvelle crispation autour de la charte des Jeux des îles de l’océan Indien. Mais pour une fois, la géopolitique n’est pas en cause. C’est d’un autre foyer qui a été allumé ce mercredi, mettant en lumière encore une fois un problème de gouvernance.
Le Comité régional olympique et sportif (Cros) réunionnais, d’ordinaire mesurée et réservée dans ses prises de positions, a décidé, en accord avec les présidents de Ligue des sports choisis aux Jeux, de claquer la porte du Conseil international des Jeux (CIJ), l’instance qui régit les Jeux des îles en élaborant notamment sa charte. Ce règlement commun est très sensible et toute modification relève de la haute diplomatie. Le point de crispation s’est cette fois porté sur l’article 7, alinéa 2, qui définit les critères de sélection d’un Réunionnais ou d’un Mahorais inscrit aux Jeux.
Selon la charte, pour porter les couleurs d’un des deux DOM lors des JIOI, un athlète doit remplir une de ces trois conditions: «être natif de l’île», «être licencié auprès d’un mouvant sportif de l’île durant trois années civiles continues incluant celle des Jeux» ou «avoir été licencié au moins cinq ans dans l’île». L’article a déjà été âprement discuté dans le passé, les autres pays de la zone craignant un appel trop fort aux Kréopolitains et maintenant des Mahopolitains pour renforcer les deux délégations françaises, alors que les Réunionnais dénoncent des naturalisations expresses de leur concurrents.
Egalité et dettes
Lors de la dernière réunion du CIJ, présidée par le Seychellois Antonio Gopal, les 27 et 28 mars derniers à Maurice, les Réunionnais ont demandé une abrogation de cet article, ou du moins que tous les pays membres soient logés à la même enseigne. Devant le refus poli et le peu d’intérêt des autres membres, les trois représentants du Cros, ont, par la voix de l’un d’eux, Thierry Grimaud, président du comité d’organisation des derniers Jeux et vice-président du Cros, exprimés leur mécontentement dans une allocution demandant à être mis «sur le même pied d’égalité», et considérant l’article 7 comme «discriminatoire».
Des dettes impayées des comités nationaux des Comores (17.000 euros) et de Madagascar (55.000 euros) sont également évoquées pour brandir la menace d’un retrait de la Réunion des Jeux des îles et donc une absence lors de la 10e édition en 2019, qui correspond au 40e anniversaire des JIOI.
Rester autour de la table
C’est surtout un ras-le-bol profond qui s’est exprimé par le biais de cet ultimatum. Celui d’une gouvernance où la Réunion face à Madagascar, les Comores, Madagascar et Maurice, qui font souvent alliance, n’a pas le sentiment d’avoir son mot à dire. «On arrive au bout de 40 ans d’un fonctionnement, estime Thierry Grimaud. Nous avons toujours la volonté que (les Jeux) soient une fête de la jeunesse et du sport. Nous voulions travailler sur la modification de la charte dans cette idée. On a adopté des principes communs, mais quand nous demandons que tout le monde soit logé à la même enseigne pour participer aux Jeux, on nous dit que ce n’est pas possible, que nous ne sommes pas égaux. On ne veut plus. On sait bien que lorsqu’il y a un litige contre la Réunion au CIJ, c’est perdu».
Le Cros menace de ne pas participer aux prochains JIOI si la question n’est pas réglée tout en affirmant ne pas vouloir laisser sa chaise vide. «Comme nous l’avions toujours fait, nous allons rester autour de la table pour la poursuite des travaux, sans que cela soit pour nous un engagement d’être avec vous pour les prochaines rencontres et Jeux», a lancé Thierry Grimaud en conclusion de son intervention à la dernière réunion du CIJ.
Et Mayotte…
La crise vient donc s’ajouter au malaise issu des derniers Jeux à La Réunion où Mayotte avait défilé sous le drapeau français lors de la cérémonie d’ouverture, provoquant le départ des Comores avant même la première compétition. Depuis, la question de la représentation de Mayotte n’a toujours pas été tranchée.
La belle idée de réunir les peuples de l’océan Indien sous l’impulsion de la Réunion en 1979 a-t-elle vécu? La prochaine réunion du CIJ est prévue en février 2018, à Maurice. Elle risque d’être très mouvementée et décisive, car après cette date, statutairement la charte ne pourra plus être modifiée. Il reste donc un peu plus de 8 mois pour trouver un terrain d’entente et remettre à plat un système de gouvernance des Jeux, embourbé dans les mauvais compromis.
RR
www.jdm2021.alter6.com
avec le JIR.
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