L’île va pouvoir se doter de nouveaux cadres compétents et formés sur place : le Centre Universitaire de Dembéni met en place des “licences pro”. Elles devraient être proposées dès la rentrée 2014.
Mayotte manque de comptables, de gestionnaires, de personnes capables de piloter des projets, de coordinateurs… Et les besoins sont immenses, notamment en matière de cohésion sociale. Seules 10 communes sur 17 ont signé un Contrat Urbain de Cohésion sociale (CUCS) qui leur permet d’avoir des moyens supplémentaires pour encadrer les jeunes, mais les agents sont rarement qualifiés. «Au 1er janvier 2015, la politique de la ville sera réformée, les CUCS se mutent en reprenant le nom de Contrats de ville et l’Etat alloue 2 millions d’euros», indique Laetitia Delahaies, directrice du Centre des Ressources de la Cohésion sociale à Mayotte.
Une manne qui ne retombe pas sur la population : «face aux manques de compétences locales, nous recrutons à l’extérieur alors que nous préférerions faire appel à des diplômés sur place». Pire certains budgets ne sont pas utilisés fautes de gestionnaires dans les associations locales.
La solution est en cours de réflexion au Centre Universitaire (CUFR) de Dembéni. L’idée avait été avancée au ministre Repentin : mettre en place des licences professionnelles. Elles permettront aux jeunes diplômés d’entrer immédiatement dans la vie active répondant ainsi au besoin en compétences de l’île.
De plus, elles correspondraient à la tendance actuelle : les jeunes préfèrent rester à Mayotte. «Nous avons jusqu’à 7 demandes pour une place en BTS. C’est bien de pouvoir stabiliser les jeunes deux ans de plus sur le territoire», témoigne Patrick James, du vice-rectorat.
A chaque secteur demandeur, sa licence pro
Laurent Chassot, directeur du CUFR, a de plus réussi le tour de force d’obtenir un accord de principe du ministère de l’Enseignement supérieur sur une homologation pour la rentrée 2014, ce qui prend habituellement prés d’une année.
De leur côté, les acteurs porteurs du projet ont déjà bien avancé : ils étaient réunis à l’Université vendredi après-midi sous l’égide d’Isabelle Chevreuil, la présidente du Conseil d’administration, pour définir ensemble le contenu des licences, leurs débouchés, jusqu’à leur intitulé.
Trois licences professionnelles seront donc proposées aux étudiants sortis de BTS ou de Licence 2ème année (L2) : Gestion et pilotage de projets, Management et techniques de gestion des entreprises et Informatique portant sur les TIC (Technologie de l’Information et la Télécommunication).
Pour intégrer cette troisième année d’université qui pourra les spécialiser sur un emploi, les prétendants seront sélectionnés sur dossier puis passeront un entretien : «il faut une mouture exemplaire pour ce premier jet !» glissait Isabelle Chevreuil.
Une politique pragmatique
Les débouchés pour la première licence professionnelle en Gestion et pilotage de projets sont les mairies ou les associations qui travaillent pour la politique de la ville, sur l’éducation au sein de la population ou encore pour l’habitat et le cadre de vie et qui ont besoin de chargés de missions ou de chargé de projets. Si la licence s’adresse aux futurs recrutés dans le cadre de la montée en puissance de la politique de la ville à Mayotte, «il faut aussi penser à envoyer la ressource existante en formation continue !» remarquait un intervenant.
La seconde devrait permettre de répondre «aux besoins énormes de l’île en comptables, mais aussi en gestion de paye, ou en capacité de répondre aux marchés publics dans les Très petites entreprises», indiquait Didier Greco, expert comptable.
Quant à la troisième, spécialisée dans les TIC, elle devra attendre la rentrée 2015 pour son ouverture : la Licence 2 de Maths-informatique, vivier de la licence pro, n’ouvrant que l’année prochaine à Dembéni.
Former c’est bien, mais s’assurer de débouchés c’est mieux : si Isabelle Chevreuil indiquait que les secteurs cernés sont actuellement en demande, «il faudra savoir s’arrêter à temps et ne proposer ces licences que sur un temps donné et avec de petits effectifs pour ensuite passer à autre chose en fonction des besoins».
Anne Perzo-Lafond
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