L’exposition photographique est à découvrir pendant un mois à la MJC de M’Gombani. Elle a été réalisée par une trentaine de lycéens mahorais et belges qui ont participé à un échange ces dernières semaines. En mars, les Mahorais ont passé 10 jours en Belgique, et les Belges finissent ce jeudi leur séjour à Mayotte. Pour chacun, le voyage a été plein de surprises.
Les élèves de l’internat de l’athénée royal Thill Lorrain de Verviers (près de Liège) en Belgique ont loué des appareils photos et se sont formés à leur usage. “On a choisi la photo comme moyen de s’exprimer, puis on a choisi trois thèmes : le racisme, la pauvreté et l’exclusion et la paix et le bonheur” explique Sophie Deraymaeker, lycéenne à Verviers. Lors de la visite des Mahorais en Belgique, la trentaine de jeunes s’est répartie en petits groupes qui ont sillonné la Belgique avec des appareils reflex.
“La photo est un moyen de langage universel”, rebondit sa camarade Améline. Selon elle “chaque photo est particulière car toutes correspondent à des moments que l’on a vécus ensemble, des moments de bonheur”.
Si les photos de Belges et de Mahorais posant ensemble illustrent largement la section “racisme” de l’exposition, les photos sur la pauvreté sont marquantes. On y voit notamment un SDF belge qui a accepté de poser. Dormir dans la rue, avec de la neige ? Les Mahorais n’avaient jamais vu ça. “Ça les a beaucoup choqués, note Shimelle Kinzomba, chargée de projet à l’association Tsigi Wani Tsigi. En effet poursuit-elle, un SDF est une personne mise de côté, alors qu’à Mayotte la pauvreté n’est pas excluante. Les jeunes voulaient l’aider, ont proposé de le ramener ici. Ils ont découvert que l’Europe c’est aussi le chacun pour soi.”
Autre réalité marquante pour eux “les vestiges de la deuxième guerre mondiale. Ils l’ont étudiée en cours, mais le voir ça les a marqués. La propreté de la Belgique aussi les a marqués.”
“On a vu des choses qu’on ne voit pas à Mayotte, confirme Neila, lycéenne en 2nde. On a découvert la neige et fait des activités dont on ignorait l’existence, comme la patinoire.” La rencontre avec le SDF a été d’autant plus impressionnante que “vue depuis Mayotte, la Belgique n’est pas pauvre” analyse la lycéenne.
De leur côté, les jeunes Belges n’ont pas manqué de surprises non plus pendant leurs 10 jours à Mayotte. Débarqués en plein mouvement social, ils ont rapidement rencontré les barragistes de Tsararano où leur sens de l’écoute leur a valu de sympathiser avec un des leaders. “On voulait aller à la plage de Sakouli, on a essayé de négocier sans succès. Puis ce barragiste a proposé de transporter nos glacières et ceux qui avaient le plus de mal. On a discuté, échangé nos numéros et fait des photos ensemble. Ils nous ont expliqué le pourquoi du comment de la grève. On nous en avait parlé avant de partir, mais l’entendre des personnes concernées était plus parlant ” relate, sourire aux lèvres, la jeune Sophie. Son amie Améline bat en brèche les idées reçues sur la pauvreté. “Ce n’est pas qu’en Belgique. Ce n’est pas qu’à Mayotte. Quand on a vu ce qui se passe sur l’île, on a été choqués, on a envie d’aider. Il y a de la pauvreté et du racisme aussi en Belgique mais pas sous la même forme.”
Mais ils n’ont pas vu que du négatif ici, loin s’en faut. “Quand on est arrivés, c’était que du bonheur, de la gentillesse, du partage. Même ceux qui n’ont rien partagent. Pour nous, c’est aussi une remise en cause.” Pour le reste, les visites, et rencontres ont été “un dépaysement total, on est allés au contact d’habitants, on a appris à faire des brochettis et découvert le manioc et le fruit à pain, c’était trop bon, et enrichissant.”
Il reste intéressant de noter que Mahorais comme Belges ont été a minima surpris par les formes que peuvent prendre la pauvreté et les discriminations à l’autre bout du monde, et ont partagé une même volonté d’aider l’autre. Plusieurs Liégeois prévoient d’ores et déjà de venir donner de leur temps à Mayotte pour entretenir les liens noués ces dernières semaines.
L’exposition photo à la MJC de Mamoudzou est donc une fierté pour ces jeunes qui ont travaillé dessus plusieurs semaines durant. “On en est fiers et on espère que les gens n’en seront que plus sensibles à ces sujets” conclut Améline.
Y.D.
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