Si les conclusions de l’avis de la Chambre régionale des Comptes (CRC) ne mettent pas en péril le contrat signé entre le Conseil général et la société d’Ida Nel pour la Délégation de Service Public (DSP) du port, les détails du rapport sont inquiétants pour les finances de la collectivité départementale.
Après le tribunal administratif (TA) en septembre 2013, la Chambre régionale des Comptes, sur saisine du préfet, a passé à la loupe la convention signée le 3 juillet 2013 entre le Conseil général et la société Mayotte Channel Gateway SAS relative à la délégation du service public (DSP) de gestion et d’exploitation du port de Mayotte (Longoni, terminal pétrolier des Badamiers et terminal croisiériste de Mamoudzou).
Alors que le TA avait rendu un jugement favorable à la société d’Ida Nel, la Chambre est beaucoup plus alarmiste dans son avis rendu le 5 novembre 2013. Elle observe « diverses irrégularités ou imprécisions”, ainsi qu'”une indemnité conséquente à acquitter par le département à l’issue de la convention ». Une somme d’un montant maximal de 48,5 millions d’euros sera en effet à débourser dans 15 ans, au titre de l’amortissement des biens investis.
Plus grave, le plan de financement du candidat retenu « n’est pas assuré pour ce qui concerne la défiscalisation et les subventions en provenance de l’Etat et de l’Union européenne » ce qui implique, « en solution de repli, le doublement de la participation du département par la non perception de sa part fixe de redevance », ce qui ne couvrirait encore que 62% du besoin en financement de la société Channel Gateway.
En espérant que tout sera bon dans le port
Car ce sont 100 millions d’euros qui doivent être investis sur 5 ans, « pour développer rapidement l’attractivité du port de Mayotte par l’installation d’outillages de levage et de manutention », un programme alléchant, mais critiqué par la Chambre sur sa faisabilité dans le temps imparti.
Les incohérences, la Chambre en relèvent plusieurs, tel que la répartition des compétences des travaux d’infrastructures, dont la responsabilité relève de la société d’Ida Nel dans l’article 1 de la Convention, et du département dans les articles 9 et 13.
Enfin, une résiliation du contrat semble impossible, car « le département pourrait devoir s’acquitter d’une indemnité représentant la presque totalité des investissements du concessionnaire ».
Un rapport dont la lecture ressemble un peu à celle des contre-indications pharmaceutiques préalables à la prise d’un médicament. Contraignante tant que tout va bien… Mais la Chambre le relève en introduction, c’est au juge administratif d’apprécier si le présent avis peut légitimer une procédure contentieuse.
Les conseillers de la Chambre régionale des comptes recommandent donc de corriger les incohérences, de provisionner la somme que devra de toute manière débourser le département sur les indemnités de fin de contrat, et d’introduire la tenue d’une comptabilité analytique.
Anne Perzo-Lafond
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