Fini les files d’attente interminables à la caisse de sécurité sociale. Enfin, il faudra attendre au moins quelques mois avant que les 90 000 assurés sociaux du département ne reçoivent leur carte vitale. Hier matin, huit heureux élus, choisis de “façon aléatoire” selon Jean Véron, le directeur de la caisse de sécurité sociale de Mayotte (CSSM), ont été les premiers à recevoir le sésame vert plastifié. “Ça va m’être très utile. Lors de mon dernier passage en métropole, j’ai dû me faire soigner, ça a été le parcours du combattant pour me faire rembourser”, témoigne Sidi Riffay, 69 ans et premier détenteur mahorais de la carte vitale.
Les assurés sociaux dès 16 ans n’ont aucune démarche à entreprendre, si ce n’est actualiser les informations sur leur adresse. Un courrier d’invitation à contacter la CSSM leur sera envoyé à leur adresse “en temps voulu”, pour une prise de rendez-vous. Pour retirer la carte, il vous faudra ensuite vous munir d’une pièce d’identité, du courrier d’invitation et d’une photo d’identité agréée.
Priorité aux malades
Plusieurs mois à plusieurs années seront nécessaires pour la diffusion de la carte plastique fabriquée à Cergy, en région parisienne. Une priorité a été mise sur les affiliés ayant un besoin vital de la carte, c’est-à-dire les gros consommateurs de médicaments et les patients devant régulièrement se rendre à La Réunion ou en France hexagonale pour des examens médicaux.
Lors du lancement de la carte vitale en 1998, la région Bretagne avait été la première équipée, au rythme de 70 000 cartes par jour ! À ce rythme, un jour et demi aurait suffi pour la diffuser à Mayotte. Mais quelques obstacles persistants, tels l’adressage ou l’actualisation de l’état civil, ne permettent pas de miser sur un rythme trop rapide.
Créée pour éliminer la sempiternelle feuille de soin et faciliter les remboursements, aussi bien pour l’assuré que pour les professionnels de santé, la carte vitale est équipée d’une puce électronique et intègre une photo de l’assuré. “On n’aura plus à utiliser l’attestation, trop facile à falsifier dans un contexte de flux migratoire important”, remarque Salim Nahouda, président de la CSSM. S’il n’y a pas de priorités, sauf raison médicale, sur la délivrance des cartes, le directeur de la sécu reconnaît que les assurés sociaux détenteurs d’un titre de séjour ne seront pas prioritaires. “D’abord ceux qui n’ont pas de date de fin de droits”, précise-t-il.
Faciliter les remboursements
La sécurité sociale mahoraise annonce un délai de remboursement de 5 jours maximum avec la carte vitale, contre plusieurs mois actuellement, pour les moins chanceux des assurés sociaux. “Ça va nous permettre une gestion plus fluide et nous exonérer de beaucoup de démarches administratives. On gagne du temps, c’est donc plus de temps pour nos patients”, s’enthousiasme le Dr. Demontéra, président de l’ordre local des médecins.
Chez les professionnels de santé, on mise beaucoup sur le rôle de facilitateur joué par la carte vitale avec les services de la sécu. “Ça simplifie les démarches avec la caisse, notamment au niveau des délais de paiement”, note Philippe Amardeilh, président de l’ordre des pharmaciens à Mayotte.
Les 17 officines de l’île sont déjà toutes équipées de bornes de lecture de carte vitale, notamment pour la prise en charge des assurés hors Mayotte. La moitié dispose de borne d’actualisation des cartes vitales, indispensables afin de mettre à jour les droits des assurés. Elles en seront toutes équipées progressivement.
La carte vitale concerne principalement la médecine de ville. Or Mayotte est un véritable désert médical sur ce point. Seuls 17 médecins libéraux équivalents temps plein exercent pour une population de 212 000 habitants.
Pour le Dr Kamel Messaoudi, président du syndicat des médecins libéraux Mayotte a fait “un bond de 50 ans en 6 ans” dans la gestion des assurés sociaux, mais la carte vitale s’apparente à “une carte bleue sans argent sur le compte”, constatant le désert médical auquel est confronté le département. Le médecin demande des mesures urgentes pour peupler Mayotte en médecins libéraux.
Une profession qui pourra désormais, avec les pharmaciens, suivre le dossier pharmaceutique des patients sur le rectangle vert, pour un meilleur suivi.
Axel Lebruman
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