Sur 8.500 tonnes consommées par an, 20 tonnes seulement sont abattues et vendues sur place. Jusqu’à présent, les producteurs importaient les poussins de métropole, dont Guillaume Rubin, gérant de la SCEA* Ekwali Couvoir, nous retrace le parcours : « Stockés dans des caisses, ils subissaient 48h de transport, avec des variations de températures, ce qui provoquait un fort taux de mortalité. » Quand le fret ne leur était pas fermé pour cause de produits prioritaires.
L’idée est donc de commencer à structurer une filière volaille à Mayotte. « Nous allons importer des œufs à couver de métropole, les laisser à incuber 18 jours, avec une hygrométrie adéquate, puis à éclore pendant 3 jours », pour être ensuite vendus à un jour aux éleveurs locaux.
Des producteurs que sont AEM et Comavi, actionnaires de la structure aux côtés de privés, comme Ekwali. C’est sur son site d’Ironi Be où se trouve déjà sa production de provende (nourriture pour animaux) qu’Ekwali couvoir, ex-Somadev s’est installé.
Distinguer les poulets des poulettes !
Et les premiers poussins à sortir de l’œuf en grande production sur le sol mahorais verront le jour le 2 avril cette année : « Nous espérons en sortir 100.000 la première année, mais notre capacité de production peut atteindre les 500.000 », indique le gérant d’Ekwali couvoir.
Un investissement qui se monte à 230.000 euros, « pour moitié financé par le FEADER », avec un préfinancement d’Ekwali (Ekwali nutrition animale étant actionnaire d’Ekwali couvoir) sur ses fonds propres, avec un prêt du Crédit Agricole.
Attention, ce n’est pas un site de production d’œufs, mais bien de poussins, « il faut distinguer les poulets de chair, que seront nos futurs poussins, et les poulettes pondeuses qui sont élevées dans le proche bâtiment de Majawy » (ex-SCAM).
Se lancer dans les œufs de reproduction sur place
C’est donc une maille de plus vers l’organisation d’une filière complète, en commençant par la production d’aliment pour bétail, en poursuivant par le couvoir, puis la production de poulets de chair, et enfin l’abattoir, « l’idée est de saturer le petit abattoir de Coconi, pour mettre en place un second, d’une capacité de 500.000 poulets. » La filière ne sera cependant complète qu’après avoir monté une structure de production d’œufs de reproduction pour éviter les importations toujours aléatoires de métropole, « nous y réfléchissons », indique Guillaume Rubin.
L’automatisation de la production ne permet de créer que deux emplois, « mais notre présence va inciter d’autres éleveurs à s’installer. » Des contrats ont déjà été passés avec la grande distribution de l’île.
Les conseillers départementaux Bichara Bouhari Payet, Issa Issa Abdou et Mohamed Sidi, présents pour l’inauguration, avançaient un possible effort sur l’octroi de mer en matière de provende et d’importation d’œufs, alors que Michel Piriou, qui assure l’intérim du SGAR, évoquait les 50% d’aides publiques pour ce projet, « et un prochain financement Feder pour l’implantation d’un silo. »
Michel Dusom, avant de faire visiter le couvoir, expliquait que le gain sur les coûts de production de poussin allaient permettre de les revendre aux éleveurs entre 1 euro et 1,5 euro, « là où ils ne descendaient pas sous l’euro cinquante avant. »
« Cet établissement, c’est un peu un poussin qui sort de l’œuf à Dembéni », glissait Issa Issa Abdou, conseiller du canton, une manière de souligner que le couvoir, on commençait à se demander si ce serait pour quand les poules auraient des dents…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* Société civile d’exploitation agricole
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