Arrivé en 2005 depuis la City londonienne comme il aime à le rappeler, pour prendre les renes d’une société alors en redressement, Mahamoud Azihary les a gardés un peu plus de 9 ans, en reconsolidant son capital, passé de 1,9 million d’euros à 60 millions. Ses capacités de gestion ne sont pas mises en cause, comme le prouve un audit demandé peu de temps avant son non renouvellement de contrat, et par le préfet Morsy qui l’avait souligné, « il a remis d’équerre la SIM. »
S’il a été éconduit de la SIM, c’est officiellement en raison d’un courrier adressé par les ministères des Finance et des Outre-mer, tutelles des sociétés Immobilières d’outre-mer, demandant que désormais, les directeurs de ces SIDOM ne fassent pas plus de deux mandats.
Une décision qui est bien la preuve selon le directeur, de l’orchestration de son éviction depuis Paris : « Dans les autres DOM, tous les directeurs des sociétés immobilières ont été renouvelés en dépit de cette note. Sauf à Mayotte », plaide Me Ahamada.
Il faut dire que Mahamoud Azihary n’a jamais eu le chic de s’entendre avec les représentants de l’Etat à Mayotte. Vu comme le conseiller principal du mouvement contre la Vie chère en 2011, il est interpellé avec force de police sur son lieu de travail plus tard en 2013, dans une affaire privée. Et s’il reproche à l’Agence française de développement et à la Caisse des dépôts de ne pas lui avoir apporté de soutien financier en 2014, c’est en raison d’un changement de règles à Paris sur les autorisations de défiscalisation. Appliqué avec zèle à Mayotte.
Autant de signes que le directeur général prend pour des actes de désamour, voire de trahison de la part de l’Etat, pourtant son principal actionnaire. La tension monte jusqu’à un remaniement du conseil d’administration qui place le docteur Ramlati Aly à sa tête. Il y voit le début de sa fin, ce qui l’aurait incité à ne compter que sur lui-même pour préparer son départ, d’où le vote de son indemnité, « calculée à partir d’un salaire mensuel de 12.000 à 20.000 euros, conforme à ce qui se pratique ailleurs, comme on le voit avec les stocks options », défend Me Ahamada.
La solidarité mahoraise en souffrance
Si la défense se base sur ce sentiment de persécution pour justifier le vote de l’indemnité, Me Idriss, avocat de la SIM, critiquera l’attitude méprisante de Mahamoud Azihary avant et après son éviction.
Et Ahmed Idriss n’a pas la tâche facile. En tant qu’avocat de la SIM, vue comme instrumentalisée par l’Etat, il va rompre la sacrosainte « solidarité mahoraise », dixit son avocat, que cherche Mahamoud Azihary, contre un Etat qui met « Mayotte en sous-France », « et que deux élus au moins ont rompue, Bacar Ali Boto et Issa Abdou qui lui ont planté un couteau dans le dos », avait souligné Me Ahamada.
Ce que le conseil d’administration de la SIM reproche avant tout à son ancien directeur général, c’est d’avoir pu voter une indemnité « de façon frauduleuse, dissimulée », dira son avocat, « sans l’avoir tenu informé ».
2 millions d’euros de réparations médiatiques
Mahamoud Azihary s’est basé pour le faire, sur une délibération de 2012 qui lui octroie des indemnités de départ en cas de non renouvellement ou de révocation, « mais il est impossible de fixer une indemnité telle qu’elle puisse dissuader d’un licenciement. Et elle s’évalue à 24 mois de salaires, soit 260.000 euros, plus un billet d’avion aller. »
Une délibération que l’avocat considère comme « nulle », « puisqu’elle n’a pas été transmise au préfet pour contrôle de de légalité », et qui souligne que les lettres de mise en demeure de rembourser les 435.480 euros d’indemnités gonflées des dédommagements, n’ont jamais reçu de réponse, « y compris quand on lui demande de justifier les montants, il fait le mort »
Sur la nullité de la délibération, Me Ahamada fera remarquer qu’elle a été votée par le conseil d’administration tout entier, où siège l’Etat.
Une indemnité surévaluée donc d’un côté, « avec notamment des frais de billets d’avion à 39.000 euros », conforme pour l’autre, « c’est une rémunération brute, à laquelle il faut rajouter les indemnités. »
Pour toute réponse à la demande de remboursement d’une somme qu’il considère comme un juste prix de 9 ans de bons et loyaux services, l’homme d’affaire demande 2 millions d’euros, « qui correspondent aux 10 ans de salaires qui le mèneraient jusqu’à le retraite », parvient à justifier Me Ahamada, « parce qu’avec ce battage médiatique, il va lui être difficile de retrouver un emploi. »
Le jugement sera rendu le 9 septembre prochain.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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