De passage à Mayotte, l’ancienne ministre de la Culture, et sénatrice des Yvelines Catherine Tasca, a participé au lancement de l’édition 2016 des Journées européennes du patrimoine. Mais ces deux jours à Mayotte n’avaient qu’un seul but, s’immerger dans les problématiques locales : « C’est une mission d’imprégnation décidée par le groupe socialiste du Sénat. En envoyant les sénateurs non ultramarins découvrir les contraintes de vos territoires, nous pouvons appuyer vos parlementaires qui se sentent souvent bien seuls dans l’hémicycle. »
A Mayotte Dominique Bailly (sénateur du Nord), Corinne Féret (Calvados), Philippe Kaltenbach (Hauts-de-Seine) et Jean-Yves Roux (Alpes de Haute-Provence) ont été guidés par le sénateur Thani Mohamed Soilihi. Sans plus de nouvelles de l’autre sénateur Mahorais, Abdourahamane Soilihi. D’autres parlementaires se sont portés candidats pour visiter les autres territoires ultramarins.
« Il naît une classe par jour à la maternité »
L’intérêt de rencontrer Catherine Tasca, c’est de pouvoir compter sur le jugement comparatif d’une élue qui vient à Mayotte pour la 4ème fois, depuis 1998. Et si elle a vu quelques avancées, elle reste sidérée par le recul de secteurs vitaux, « comme les écoles et l’assainissement. »
Les points positifs sont prometteurs puisqu’elle a rencontré une nouvelle génération d’élus impliqués : « Ils se saisissent des moyens que leur offre la départementalisation, et sont davantage conscients de l’intérêt général que leurs aînés. » Elle expose aussi les moyens supplémentaires « sur la sécurité, la santé, les écoles », apportés par un gouvernement dont elle porte la couleur politique.
En revanche, elle se dit impressionnée par les conséquences de la pression migratoire : « L’explosion démographique qui en découle est une dimension difficile à assumer pour ce département. Mon collègue Thani Mohamed m’explique qu’il naît chaque jour l’équivalent d’une classe ! Quel pays, quel département pourrait faire face ?! »
« Un Plan Marshall pour Mayotte »
La sénatrice a constaté au terme de ces deux jours de visite, une détérioration de la situation en terme de santé, de scolarité, de logement ou d’urbanisme, « avec des constructions non maitrisées qui grignotent chaque parcelle, l’assainissement ne peut pas suivre. Surtout sur une terre où demeurent des difficultés de régularisation foncière. »
Pas d’alternative pour Catherine Tasca, « il faut mettre le paquet, avec la même ambition que pour le plan Marshall après la 2ème guerre mondiale. Il faut une enveloppe nationale et européenne pour construire le développement. »
Elle va encore plus loin en évoquant l’urgence de règlements dérogatoires : « L’humain est en souffrance ici. On ne peut pas faire entrer dans une bouteille plus qu’elle ne peut en contenir. Je m’interroge sur une possible suspension du droit du sol à Mayotte. » Un thème qu’avait déjà soulevé le sénateur PS Thani Mohamed Soilihi, sans qu’il soit repris ou débattu sérieusement sur le territoire. Laissant le champ libre à des récupérations qui obèrent le débat. En le reprenant, la sénatrice prouve qu’on ne peut plus s’en exonérer.
Catherine Tasca est repartie ce dimanche, avec des arguments qu’elle compte bien faire valoir au sein du Palais du Luxembourg.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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