L’annonce par la ministre de la Santé d’une enveloppe de 172 millions d’euros pour le Centre Hospitalier de Mayotte (CHM), sollicitée par le député Mansour Kamardine, est la preuve nécessaire que la ministre a été interpellée par la vacuité du système de santé à Mayotte lors de son passage sur l’île.
Aggravée quelques jours plus tard par les aveux des représentants de l’Agence régionale de Santé océan Indien (ARS OI) qui évaluaient des dépenses annuelles de santé à 900 euros par habitant à Mayotte quand elles sont de 3.000 euros à La Réunion.
Une preuve nécessaire mais pas suffisante, de la part de la ministre Agnès Buzyn, car agrandir n’est pas guérir. Le système de santé est malade d’un déficit de prise en charge des patients à l’acte, notamment de ceux qui sont en situation irrégulière sur le territoire faute de mise en place de l’Aide Médicale d’Etat (AME), prestation sociale qui leur permettrait d’avoir accès aux soins.
Agrandir pour remplir… à soignants constants
« Nous sommes un des seuls deux hôpitaux français avec Saint Pierre et Miquelon à bénéficier d’une dotation globale, au lieu d’être tarifé à l’activité », rapportait Xavier Montserrat, directeur de l’agence mahoraise de l’ARS OI.
Donc, si la dotation est gonflée dans la même proportion que les arrivées de kwassas sanitaires, on ne s’en sortira pas. C’est sans doute l’objet d’une deuxième mesure annoncée par Agnès Buzyn : « L’envoi à Mayotte d’une mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) qui formulera ses propositions pour l’amélioration du système de santé en janvier prochain », rapporte le député Mansour Kamardine.
L’IGAS comme relais
Qui ne peut que se réjouir “de cette décision de modernisation et d’agrandissement des capacités d’accueil du CHM de 60%”. Difficile de savoir si la somme de 172 millions d’euros comprend les 30 millions prévus pour Petite Terre, et certains professionnels évoquent des mesures de création de blocs régulièrement avancées, mais jamais concrétisées.
Mansour Kamardine souhaite saisir la mission de l’IGAS, “pour réitérer la demande d’élargissement du code la santé et du code de la sécurité sociale dans les meilleurs délais à Mayotte. Nous souhaitons qu’une feuille de route spécifique soit établie en concertation avec les acteurs locaux de la santé. » N’oublions pas que le passage de l’IGAS sur l’action sociale, relayé par une forte volonté politique ici, aura permis de décrocher les millions de l’ASE et des PMI.
Un hôpital agrandi mais vide n’a pas non plus beaucoup d’intérêt : « Le renforcement du personnel soignant est une nécessité qui doit être prise en compte par l’IGAS, au même titre que la rémunération des personnels de santé. Il n’est pas acceptable que les conditions de rémunération à Mayotte soient inférieures à celles des autres personnels relevant de l’ARS OI. Les revendications d’égalité salariales qui motivent en ce moment le mouvement social au CHM doivent être entendues », conclut-il.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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