La situation est simple. Le capital de la compagnie réunionnaise Air Austral est détenu à 87% par une société d’économie mixte, la Sematra, créée en 1990. Dont la Région Réunion est propriétaire à 74%, et le Département à 11%. La Sematra contrôle aussi la compagnie Ewa, basée à Mayotte. Air Austral détient également des participations au capital de la compagnie Air Madagascar à hauteur de 49 % à travers une filiale dénommée Air Austral Invest.
Une nouvelle fois, la Chambre Régionale des Comptes de La Réunion publie un rapport critique sur la gestion de la SEMATRA pour les exercices 2014 et suivants. La Région Réunion en dépassant plus de 33% du capital d’une société commerciale déroge au code général des collectivités territoriales, et le Département, aux règles d’actionnariats érigées par la loi NOTRe (Nouvelle Organisation de la République). Ce dernier n’a en effet plus de compétence économique depyis le 1er janvier 2017.
Une situation connue du président du conseil départemental de La Réunion qui avait annoncé en avril dernier vouloir vendre ses parts, évaluées entre 7 et 8 millions d’euros. Le site Tourmag avait même évoqué comme potentiel repreneur le conseil départemental de Mayotte… Mais celui-ci, s’il possède la compétence économique au titre de celle de Région, par sa collectivité unique, avait démenti. Surtout tant que le toilettage institutionnel n’a pas abouti à scinder les deux entités, Département et Région.
« L’intervention des acteurs publics dans le secteur du transport aérien comporte des risques économiques et financiers », alerte la CRC, qui évoque la variation du cours du dollar, et la volatilité des prix du carburant comme « susceptibles d’affecter les résultats d’exploitation et d’accentuer le poids de la dette. »
Recherche de partenaires privés biocompatibles
Sans compter que, comme nous l’avait confirmé le PDG d’Air Austral, Marie-Joseph Malé, l’arrivée de French Bee, fragilise la compagnie. Mais il s’était voulu rassurant quant au retour à l’équilibre, même avec le poids des difficultés financières de son nouveau partenaire Air Madagascar. « Dans ce contexte, la valorisation d’Air Austral est un enjeu pour la Sematra et ses actionnaires, notamment au regard de l’augmentation de capital de 48 M€ sollicitée par la compagnie en 2016 pour financer son développement », concluent les magistrats.
La situation, le président de la Région Réunion la connaît par cœur, et c’est quasiment un courrier type qu’il envoie en réponse. Il rappelle que l’arrivée de la Région, du Département et de la Caisse des Dépôts et consignation en 2012 était destinée à renflouer Air Austral « et assurer la pérennité de son exploitation », et la deuxième augmentation de capital en 2016, à « accompagner son développement. »
La Sematra n’envisage pas d’augmenter son niveau de participation, et donc, n’achètera pas les parts du Département. Pour diversifier le capital il faut donc chercher des partenaires privés, qui soient « en accord sur la gouvernance et la vision stratégique ». Pour l’instant, personne pour racheter les parts du Département.
Didier Robert défend l’opportunité de l’alliance avec Air Madagascar, « avec des relais de croissance de l’activité pour Air Austral ». On le croit sur parole au regard de la position quasi-monopolistique sur certaines dessertes dont Mayotte.
On a donc le sentiment que ce méli-mélo de public-privé n’est pas prêt de cesser.
Lire le Rapport CRC Sematra 2010
Anne Perzo-Lafond
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