Les récifs éloignés du canal du Mozambique sont des pépites du patrimoine maritime français. Protégés par le Parc Marin, ces sites n’en restent pas moins mal connus, en raison de la distance et donc du coût que représentent les missions sur place.
“L’éloignement des récifs coralliens situés au nord du canal du Mozambique rend leur suivi complexe, coûteux et donc rare. Pour faire le point sur leur état de santé, le Parc naturel marin de Mayotte a mis en place une mission d’acquisition de connaissances, en coopération avec les Terres australes et antarctiques françaises” informe le Parc Marin dans un long communiqué dédié à cette mission. “Débutée le 20 septembre, la mission a pris fin le 12 décembre et s’est déroulée en trois campagnes permettant de passer 29 jours sur les lieux d’étude : le banc de la Zélée dans le périmètre du Parc naturel marin de Mayotte, le banc du Geyser, Grande Glorieuse et l’île du Lys au sein de la Réserve naturelle nationale de l’archipel des Glorieuses.”
Le but affiché est “d’acquérir des connaissances scientifiques pour une meilleure gestion”.
“Le suivi et l’évaluation de l’état de santé des écosystèmes récifaux constituent des enjeux centraux dans la gestion de ces espaces protégés dans un contexte d’accélération du changement climatique et d’exploitation croissante des ressources naturelles” poursuit le Parc.
La mission visait l’acquisition de nouvelles connaissances sur les bancs du Geyser et de la Zélée et la réalisation des suivis déjà en place aux Glorieuses afin d’orienter les mesures de gestion, avec notamment : la mise en place de nouvelles stations de suivi des écosystèmes coralliens sur les bancs de la Zélée et du Geyser, et le suivi des stations déjà en place dans l’archipel des Glorieuses ; l’immersion de caméras rotatives pour l’étude des populations de poissons commerciaux ; le suivi des holothuries dans l’archipel des Glorieuses pour évaluer les populations et la pression du braconnage ; le suivi des communautés de macrofaune présentes dans le sable de l’archipel des Glorieuses, pour établir un état de référence et ainsi évaluer les dégradations en cas de pollution aux hydrocarbures ; le suivi de la température des eaux de surface dans l’archipel des Glorieuses, et la pose d’une nouvelle sonde sur le banc de la Zélée, participant à la veille sur les phénomènes de blanchissement corallien ; mais aussi le suivi des macrodéchets en mer pour évaluer leur quantité et leur provenance.”
Autre enjeu, le renforcement du travail partenarial entre les parcs marins des Glorieuses et de Mayotte, sous l’autorité du préfet des TAAF.
“La richesse du milieu marin de l’archipel des Glorieuses, et l’enjeu de sa protection, ont motivé en 2012 la création du Parc naturel marin des Glorieuses. L’équipe technique de ce parc était commune à celle du Parc naturel marin de Mayotte, les deux parcs ayant toutefois des conseils de gestion distincts.
Face à l’augmentation des pressions (pêche illégale notamment) et à la nécessité d’inclure le périmètre terrestre dans la zone protégée, le statut de protection de ce territoire a évolué vers une Réserve naturelle nationale créée en juin 2021. La gestion de la RNN de l’archipel des Glorieuses est confiée au préfet, administrateur supérieur des TAAF.
Cette mission conjointe entre les équipes historiques du Parc et l’équipe TAAF de la nouvelle RNN de l’archipel des Glorieuses, permet à la fois de s’assurer de la continuité des actions mises en place dans le cadre de l’ancien Parc en matière de suivi, mais aussi de garantir l’harmonisation des méthodes et protocoles mis en œuvre sur les deux espaces pour permettre de comparer les résultats obtenus.”
Autre enjeu affiché, s’offrir les moyens de comparer ces récifs, similaire et néanmoins distants, avec une campagne rapprochée dans le temps.
De nouvelles espèces découvertes
“Mayotte, l’archipel des Glorieuses et les bancs sous-marins du Geyser et de la Zélée présentent des écosystèmes aussi riches que fragiles. L’un des enjeux communs de la RNN de l’archipel des Glorieuses et du Parc naturel marin de Mayotte est de garantir le maintien des ressources marines, tant pour des questions environnementales que socio-économiques. Cependant les enjeux de gestion restent distincts en raison de la spécificité de ces deux territoires. Du fait de son isolement et de l’absence d’habitants permanents, l’archipel des Glorieuses présente un patrimoine naturel exceptionnel dans un état quasi originel. Considéré comme un réservoir de biodiversité, il est un point de référence à l’échelle régionale, notamment pour mesurer les effets du changement climatique sur l’environnement. À Mayotte, les écosystèmes marins sont davantage exploités du fait des pressions liées aux activités humaines, en mer et à terre, dans un contexte de démographie croissante. La réalisation de cette campagne conjointe, qui suit des protocoles identiques, permet d’étudier les variations de l’état de santé des écosystèmes marins depuis Mayotte, soumise aux pressions les plus directes, jusqu’à l’archipel des Glorieuses où les activités sont strictement réglementées”.
Des règlements et des mesures de protections afférentes qui nécessitent des moyens. Or en mer comme à terre, la tendance est à la mutualisation des moyens et des coûts. “La synergie entre le Parc et les TAAF permet, d’un point de vue opérationnel, de mutualiser les moyens humains, notamment à travers la mise à disposition des plongeurs professionnels des deux structures, la mobilisation en commun d’experts extérieurs ainsi que de moyens logistiques et matériels pour assurer les trois missions de terrain programmées pour cette campagne” indique encore le communiqué, qui précise que les forces armées ont apporté leur concours, avec notamment la mobilisation du Champlain.
Quelques résultats
Premières informations clés, cette campagne a permis de mettre au jour de nouvelles espèces : “des espèces nouvelles pour les territoires de l’archipel des Glorieuses et de Mayotte ont été identifiées parmi les nudibranches, les poissons et les crustacés. Le constat d’une diminution des populations d’holothuries et des poissons d’intérêts commerciaux, confirme la présence d’une pression de pêche illégale dans les eaux de l’archipel des Glorieuses. Les experts ont constaté que les peuplements de coraux sont en bonne santé, leur diversité exceptionnelle semble stable dans le temps, bien qu’il reste quelques traces du dernier épisode de blanchissement lié au réchauffement des eaux en 2016.”
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