Le mouvement de grève des urgentistes n’est pas passé inaperçu ce jeudi matin. A contre-courant des autres rassemblements du jour, qui concernaient plutôt les salaires dans la fonction publique, ces agents réclamaient, eux, plutôt du repos.
A l’origine de cette grève, l’accumulation sans fin de jours de récupérations pour les agents, soumis à de nombreuses heures supplémentaires en raison du turn-over important qui agite l’hôpital. Un cercle vicieux qui conduisait des agents à cumuler des jours de récupération pour remplacer leurs collègues eux-mêmes en récupération. Résultat, ces jours ne pouvaient plus être pris, et certains agents en ont capitalisé des centaines d’heures. Pour certains, jusqu’à 4 mois entiers d’heures supplémentaires se sont accumulés.
“Je suis là depuis un an et demi, j’ai déjà 240 heures à récupérer”, indique Benjamin Nogues, infirmier aux Urgences du CHM. “Le problème c’est que c’est un cercle vicieux, on fait plus d’heures et on a des REC, et quand on les prend les collègues doivent nous remplacer. En fait notre effectif est rarement plein, on accumule des récupérations car des postes ne sont pas pourvus. Ce n’est pas pour blâmer la direction, ils essayent, mais il y a des infirmiers qui sont là pour 3 ou 6 mois, ça entraîne des effectifs plus petits” regrette l’infirmier.
Dans l’incapacité de permettre à tous les agents de partir aussi longtemps, “la solution c’était de les payer car des agents ont jusqu’à 4 mois d’heures supplémentaires, c’est beaucoup, il fallait remettre les compteurs à zéro” indique le CHM. “J’ai pris l’initiative d’annoncer aux agents que j’allais les payer car ça ne sert à rien de mettre du temps virtuel sur des compteurs” assure Christophe Blanchard, directeur par intérim du CHM.
“Fatigués, on a du mal à accueillir les gens comme il faut”
Mais pour certains agents, cette solution pourrait pénaliser les patients. “Nous payer ces récupérations fait qu’on n’aura pas les jours de repos qu’on a demandé. Oui on va avoir un gros chèque mais ce n’est pas ce qu’on demande” rebondit Benjamin Nogues, “à Mayotte on est tous d’accord pour dire qu’on est suffisamment bien payés, on n’est pas là pour ça. Mais quand on est fatigués, on ne fait pas de la même manière notre métier et on a du mal à accueillir les gens comme il faut. On préfère être reposés que mieux payés.”
Pour Christophe Blanchard, qui a reçu les grévistes jeudi matin, la grève résulte surtout d’un “manque de communication”. Pour lui, les repos pourront être pris.
“Ce qu’on veut c’est solder ces heures, si quelqu’un a 3500€ d’heures sup’, libre à lui de faire un break de deux ou trois semaines. Certains veulent des congés et ils en ont besoin c’est une réalité. Ca sera possible pour eux de prendre des congés sans solde puisqu’ils auront eu l’argent.” Impossible en revanche de donner l’argent à certains, et des congés rémunérés aux autres. Vu la somme d’heures à solder, la charge de travail serait colossale pour les chefs de service. Une solution qui avait déjà été discutée en septembre, et qui sera de nouveau évoquée lors d’une réunion mardi prochain. Et si elle ne fait pas l’unanimité, la direction l’assure, le paiement des heures supplémentaires était une demande “de longue date” qui devrait satisfaire “la majorité”.
Y.D.
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