C’est une performance que vient de boucler le maire de Mamoudzou : organiser sur trois soirées consécutives des concerts drainant des dizaines de milliers de personnes, des familles entière, jusqu’à atteindre 15.000 spectateurs samedi, avec entrées gratuites. Même en métropole, peu oseraient s’y frotter. Alors, sur une île réputée pour ses phénomènes de délinquances juvéniles, cela relève du défi. Et si la presse nationale ne daigne pas le souligner, préférant se focaliser une fois de plus sur ce qu’elle pense être vendeur, en local, nous devons marquer le coup.
Ambdilwahedou Soumaila revient pour nous sur cette méga-organisation, entachée uniquement sur sa toute fin par un mouvement de foule, et évoque le service après-vente pour les artistes mahorais.
Avez-vous sollicité un cabinet extérieur pour organiser ce festival ?
Ambdilwahedou Soumaïla : Pas du tout, mes équipes de la direction culturelle ont travaillé en interne, celle qui la dirige a su mobiliser. Nous avons financé le festival par notre budget culture, notamment de la Politique de la Ville. Nous avons également fait appel à des sponsors, notamment en terme de logistique ou de matériel.
Vous attendiez-vous à un tel succès ?
Ambdilwahedou Soumaïla : Nous savions que cela allait attirer du monde, surtout Niska, car après les restrictions sanitaires de deux années consécutives, sans festivité, les gens ont besoin de sortir. Je suis heureux que cela ce soit bien passé dans l’ensemble.
Dans une île compliquée, il n’y a eu des incidents qu’en toute fin de la dernière soirée, et encore, rien de grave, et pourtant la presse nationale ne retient que cela…
Ambdilwahedou Soumaïla : L’insécurité est tellement prégnante ici, qu’un simple mouvement de foule a entrainé un effet boule de neige. Il a suffi que quelques jeunes se bagarrent pour que cela réveille la crainte chez les spectateurs, alors qu’il n’y avait rien de grave. Des bagarres, il y en a au cours des matchs de foot en métropole, mais la police disperse, et les gens autour continuent leur soirée. Ici, cela s’est traduit immédiatement par de la panique, avec un enchainement disproportionné ensuite. Des gamins ont ensuite profité de ce mouvement de peur pour caillasser.
Les médias nationaux pourrait aussi mentionner que pendant deux jours et demi, tout s’est bien passé. Et Niska, sur ses 45 minutes, a placé deux séquences, il est tellement frustré qu’il veut revenir, ça nous encourage.
Pour que cela ne dégénère pas, il faut que les gens s’habituent à un climat plus apaisé le soir, à vivre autre chose qu’au milieu de la crainte. C’est l’esprit que nous essayons d’impulser. Nous avons été élus pour redonner confiance, créer des conditions d’attractivité du territoire, nous avons donc fait le choix d’une ville qui vit, cela ne pourra pas changer du jour au lendemain, mais nous allons persévérer.
Vous avez d’autres projets ?
Ambdilwahedou Soumaïla : Nous allons organiser une grande course de pirogues en octobre, nous voulons aussi mettre en place des fan zones pour la coupe du monde au Qatar, et nous nous sommes réunis ce lundi avec mes équipes pour tirer des leçons de l’organisation de ce festival pour préparer Sanaa 2023.
Y-avait-il assez de forces de l’ordre pour ces trois soirs ?
Ambdilwahedou Soumaïla : Autour du périmètre de la scène, il y avait 60 policiers nationaux et gendarmes, 20 policiers municipaux, deux sociétés de gardiennage, des fouilles ont été pratiquées, et une trentaine de jeunes bénévoles. Et à l’extérieur de ce périmètre, 80 policiers nationaux patrouillaient. C’est pourquoi il n’y a pas eu de débordements dans le centre-ville. S’il s’avère que ce n’est pas suffisant, on mettra le paquet pour les prochaines éditions. Car cela est bénéfique aussi pour les artistes locaux.
De quelle manière ?
Ambdilwahedou Soumaïla : Nous avons prévu des séquences d’échanges entre les artistes internationaux et locaux. Ce lundi, ils sont tous partis sur le lagon ensemble, ça va permettre de tirer nos musiciens vers le haut, ils vont échanger sur les circuits pour se professionnaliser. C’est important de créer aussi ces conditions, au delà du vivre ensemble auquel nous avons consacré une semaine.
Propos recueillis par Anne Perzo-Lafond
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