Entre délinquance et foncier, les forces de l’ordre sont sollicitées. Ce nouveau motif de discorde a l’inconvénient d’être quasiment insoluble. Des habitants coutumiers et des propriétaires revendiqués s’affrontent actuellement à Bouyouni.
Depuis un mois, les tensions se font plus vives autour de terrains à Bouyouni : au début du mois de septembre, des habitants de la commune avaient détruit des plantations de cultivateurs originaires de Mtsahara. Ce qui avait motivé une première intervention de la gendarmerie.
Rebelote ce samedi matin : une altercation a opposé une quarantaine d’habitantes de Bouyouni s’en prenant aux mêmes cultivateurs, alors qu’elles souhaitaient borner les terrains qu’elles revendiquent. Difficile de savoir pour les gendarmes qui est dans son droit, eux revendiquant une occupation de bonne foi, paisible et continue d’un terrain qu’ils ont mis en valeur au cours des années, comme l’exige la règle du droit coutumier.
L’ambiance est devenue électrique lorsque les forces de l’ordre ont interpellé un étranger en situation irrégulière, défendu par les bouénis (mamans) de Bouyouni. Ils ont reçu une pluie de cailloux, acte disproportionné au regard du motif du conflit. Les véhicules des forces de l’ordre endommagés, ils ont décidé de lever le camp. C’est alors que les habitantes de Bouyouni ont décidé de kidnapper un agriculteur de Mtsahara, qu’elles tenaient en otage contre la libération de l’étranger en situation irrégulière.
Déposer plainte
Elles l’ont finalement relâché et les gendarmes de leur côté procédaient à d’autres interpellations, dont 5 personnes en situation irrégulière, ainsi qu’un probable auteur du caillassage.
De leurs côtés, les maires ne sont pas particulièrement actifs dans le règlement de la situation. Le maire de Mtsamboro s’est malgré tout rendu sur place depuis le début des tensions. Mais il faudrait que son confrère de Bandraboua noue un contact qui pourrait apaiser les tensions. Il est probable qu’eux-mêmes n’y comprennent pas grand chose dans ces questions de titres de propriété qui se lèguent souvent au sein des familles, et dont certains ont été attribué du temps de l’appartenance aux Comores.
La démographie et le flux migratoire impliquent constructions, défrichages et plantations sauvages. Plus on attend pour résoudre les problèmes de foncier, plus ils seront insolubles. Et les tensions d’éclater un peu partout : entre Kahani et Ouangani où ça pourrait barder ce mardi matin, à Mtsangamouji, à Chirongui… autant de feux que les gendarmes doivent éteindre sans en connaître les vrais fautifs.
Les habitants doivent se retourner vers le conseil départemental et sa Maison du foncier, et en cas extrême, ont toujours la possibilité de déposer plainte. Les juges pourront alors se faire aider des cadis sur ces questions de droits commun et coutumiers.
Avant d’utiliser la dernière arme, le jugement de Salomon en partageant chaque terrain entre tous les prétendants ?…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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