Le parcours du combattant d’une jeune femme qui a tenté de refaire faire son permis de conduire volé, à Mayotte… L’opération intrépide met à jour quelques dysfonctionnements en préfecture. Une seule morale: «patience et longueur de temps font plus que force ni que rage». Mais cela va mieux en le rapportant malgré tout…
«Vous avez de la chance!» Farida n’en croit pas ces oreilles en entendant cette exclamation. Pas du tout parce que, victime d’un vol à l’arrachée en début d’année, avec son sac à main ce sont tous ses papiers qui sont partis vers d’autres cieux. Mais pour le parcours du combattant qu’elle a du vaincre, sur la seule pièce du permis de conduire. Elle se rend donc en préfecture où l’attend un couloir exigu à une entrée, destiné à la fois aux demandes de cartes grises et de permis de conduire. Ça tombe bien, elle doit refaire les deux. Elle interroge… «Non, malgré le compteur de tickets qui s’affiche en rouge, aucun numéro n’est délivré». Pas de problème, elle est la dernière arrivée.
Personne au guichet destiné à l’accueil et à la distribution des imprimés. Elle attendra donc une heure et demi pour connaître la liste de pièces à fournir. Et revient avec ses timbres fiscaux de 25 euros pour son permis de conduire. Cette fois, c’est la foire d’empoigne entre deux hommes qui se disputent la place. Toujours sous la lumière du compteur de tickets initialisé sur un double zéro. Tout finit par rentrer dans l’ordre, et Farida voit partir son dossier dans les mains d’une guichetière qu’elle aurait souhaité plus accueillante.
«C’est La Poste!»
C’est en rentrant de vacances en mai 2015 qu’elle constatera que son permis était arrivé à La Poste. Mais faute de l’avoir retiré à temps, il est reparti vers une destruction assurée, confirmée par les services de l’ANTS, l’Agence Nationale des Titres sécurisés, qu’elle a joint au téléphone.
Elle retourne donc en préfecture où une heure et demi de queue plus tard, elle apprendra que l’Etat n’est pas mauvais garçon en la matière, puisque seule une photo d’identité suffit pour sa deuxième demande.
Là, c’est l’attente d’un récépissé postal qui n’arrivera jamais, «c’est La Poste!» répond-on fataliste en préfecture, où on confirme la très probable destruction de la pièce. Nous sommes au mois d’août 2015. Ayant un stock conséquent de photos d’identité en main, rebelote, pour Farida et, après deux heures d’attente cette fois, une nouvelle demande est formulée, «attention, vérifiez bien dans un mois sur le site de l’ANTS». Clair qu’elle va vérifier.
Un permis au frais dans un tiroir
Surtout que plus d’un mois après, en ce début novembre, toujours pas de récépissé de La Poste. Sur le site de l’ANTS, le curseur reste bloqué sur le chiffre 5: «votre permis est en préfecture». Craignant qu’il s’envole de nouveau, elle téléphone. Un coup de fil utile, qui révèle dans un premier temps que «non, c’est pas possible, c’est pas chez nous, ça arrive toujours à La Poste».
Après beaucoup d’insistance, on lui déclare qu’il est bien en préfecture. Elle y aura droit de nouveau à une heure d’attente pour obtenir le sésame dernier cri, sécurisé avec puce électronique.
«On peut dire que vous avez de la chance!» s’exclame-t-on, sentant monter son énervement. Impossible de le digérer autrement qu’au stade de l’humour deuxième degré… Surtout qu’après avoir regardé la date figurant sur l’enveloppe, elle manque de s’étouffer: le permis était en préfecture depuis le 4 août, au frais dans un tiroir quand elle lançait une troisième relance tout à fait inutile.
Un permis qu’elle refuse de garder sur elle de peur qu’il soit de nouveau volé, «je vais peut-être l’encadrer», songe-t-elle…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
Comments are closed.