A 8h30, dix personnes étaient présentes sur la place de l’ancien marché. Déçus les organisateurs du « Collectif sur la fiscalité et le foncier à Mayotte ». Car forts de leurs 15.000 signatures* au bas d’une pétition en faveur d’une fiscalité dérogatoire sur 30 ans et d’une régularisation gratuite des terrains, ils avaient effectué un battage médiatique prometteur. Il n’en fut rien.
Une heure plus tard, une cinquantaine de personnes s’élance en cortège, banderoles en main, pour un passage, sans halte, devant les Services fiscaux, avant de redescendre au rond point de la barge. Une voiture démarre en trombe, un homme en colère au volant pile net : « Je ne vais pas défiler car je suis écœuré par nos concitoyens. On a sorti cette pétition et on se bagarre pour leur patrimoine, et ils ne se déplacent pas ! »
Sur le trottoir, certains reprochent un mouvement politisé, « ce sont des conseillers d’opposition qui ont lancé ça ! »
Un moratoire dès 2016
Parmi les personnalités présentes, on trouve Chihaboudine Ben Youssouf bien sûr, qui a lancé la pétition, et son comparse conseiller départemental centriste d’opposition Daniel Zaïdani, qui justifie l’action, alors que les conseillers de la majorité planchent actuellement avec les maires sur une révision de la fiscalité à remettre à Manuel Valls en prévision de la loi de finances 2017 : « Qu’il y ait révision pour 2017, c’est une bonne chose. Mais nous demandons que dès cette année, les contribuables mahorais soient épargnés par un impôt confiscatoire », explique le conseiller de Pamandzi.
Il se défend d’un mouvement à connotation politique, « c’est justement pour éviter ce piège que nous avons sollicité l’eurodéputé Younous Omarjee, et non nos parlementaires, socialistes ou de droite. » Une rencontre avec le gouvernement est toujours envisagée, sans plus de contact, pour fin avril, « la pétition sera déposée quinze jours avant. »
Les vérandas intégrées à la surface habitable
Sur le moratoire de 30 ans demandé au gouvernement, « le temps que le cadastre et la régularisation soit terminée », Daniel Zaïdani expose les arguments qu’il compte développer à Paris : « Lorsqu’en métropole ils se sont aperçus que les retraités étaient noyés sous les impôts locaux, le conseil des ministres du 4 novembre 2015 a tout stoppé. Il y a donc des précédents. »
Il rappelle que les 84% de la population sous le seuil de pauvreté ne pourront pas payer une taxe foncière qui ne dépend pas du montant des ressources, « certains ont un avis de 2.000 euros à payer avec une retraite de 400 euros ! »
Et dénonce surtout des mesures prises à la va-vite : « Faute de permis de construire ici, la DEAL a pris des photos aériennes des toitures, intégrant les varangues et vérandas dans la surface habitable. Ils auraient dû dans ce cas inciter les habitants à venir ensuite vérifier leur surface dans leurs services. » Des erreurs d’adressage des taxe d’habitation sont également signalées.
« Ce n’est pas que nous ne voulons pas payer d’impôt », glisse un manifestant, « mais la fiscalité n’a pas été paramétrée en fonction des spécificités locales. »
La faible affluence à la manifestation s’explique aussi parce que les habitants délèguent, selon Daniel Zaïdani : « Pour la plupart, c’est un combat qui relève des élus. » Pas faux.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
*En attente de validation de l’huissier
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