La venue de Claudine Ledoux, l’ambassadrice de la coopération régionale dans la zone Océan Indien, était l’occasion de faire un point au Conseil général sur les actions engagées. Et sur les freins, liés à la position géopolitique de Mayotte dont les angles tendent à s’arrondir malgré tout.
Les entreprises mahoraises renforcent leurs échanges commerciaux vers les îles voisines. La coopération privée est en marche quand l’institutionnelle butte sur de nombreux problèmes. Car Mayotte se sent un peu seule dans sa région : non intégrée dans la COI (Commission de l’Océan Indien*), ce que l’ambassadrice n’avait pas l’air de savoir lorsqu’elle indiquait «représenter Mayotte et la Réunion quand j’y siège”, exclue de représentativité officielle aux Jeux des Iles, et tentant péniblement de remonter un Haut Conseil Paritaire avec l’Union des Comores malgré le différent politique.
Le fait que les Comores considèrent toujours Mayotte comme membre de l’Union des Comores bloque tous les dossiers dépendant des organismes sus cités, et la participation des Mahorais aux jeux des Iles sans hymne national, ni drapeau suscite l’incompréhension sur l’île : «Il n’est pas normal que l’État cautionne cette discrimination ! Il faut faire de ce sujet un préambule à toute discussion avec Corinne Ledoux», indiquait le vice-président du Conseil général Jacques-Martial Henry. Ces conflits cristallisent l’agacement, «la COI est une coquille vide qui n’existe que pour entraver la liberté de conscience, nous nous en passerons !», mais n’a pas entamé les bonnes volontés.
En effet, une fois ce constat d’isolement fait, le projet Canal du Mozambique s’est imposé, «basé sur le socle commun tissé par des liens culturels et historico-économiques des régions et pays de Nosy Be, Diego et Majunga (Madagascar), Grande-Comore, Anjouan et Mohéli (Union des Comores), Tanzanie, Mozambique et Mayotte», détaillait Michel Ahamed, directeur du Comité du Tourisme à Claudine Ledoux. La participation des trois îles sœurs des Comores est bien la preuve pour les organisateurs que l’économie peut transcender le politique, et la coopération privée tenter de prendre le pas sur l’institutionnelle. Mais les deux sont étroitement imbriquées…
Les petits chantiers régionaux font les grandes insertions
En effet, l’organisation de cette opération, tout comme de nombreuses autres, se heurte à la frilosité du gouvernement français en matière de délivrance de visas, «problème récurrent», soulignait Michel Ahamed. Et les situations de blocage vont empirer sur les échanges, soumis désormais aux normes européennes dont sont éloignées les entreprises voisines.
«Nous sommes un grand village», se plait à dire Jacques-Martial Henry pour parler de la zone Mozambique-Océan Indien. Cela se vérifie par le chantier école mené par l’OIDF (Organisation Ingénierie Développement Formation) dans la région malgache de Diana, où, grâce au financement commun de 121.000 euros, Conseil général par LADOM, OIDF, Etat par le Fonds de coopération régionale, Mission locale et l’Ecole Polytechnique d’Antsiranana, un bâtiment a pu être réhabilité. 12 jeunes Mahorais de 18-25 ans inscrits à la Mission locale, s’y sont investis et ont pu rebondir : «8 sont partis en formation Bâtiment Travaux publics à l’issue du chantier, un a été employé en CDI dans une entreprise de peinture, un autre s’est engagé dans l’armée», retraçait Asna, OIDF.
Un bel exemple de réussite «gagnant-gagnant», leitmotiv européen en matière de coopération régionale, dont les fonds sont prêts pour ce genre de projets, comme sur le projet Franco jeunes ou de pêche en mer avec Green Fish.
«Je suis ici pour rencontrer les acteurs de la coopération régionale», commentait Claudine Ledoux. Ces derniers attendent désormais qu’elle les aide à entrouvrir les portes en remontant les demandes à Paris.
Anne Perzo-Lafond
* La COI est composée de cinq Etats, Seychelles, Maurice, Madagascar, Comores et France par l’île de la Réunion
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