On connaissait la bulle internet ou les bulles immobilières. La Réunion vit actuellement la fin d’un autre type de bulle: la bulle aérienne. Depuis des années, les Réunionnais s’enorgueillissent de la croissance du trafic de l’aéroport de Saint-Denis s’appropriant l’exclusivité du succès de la destination Réunion. Ils avaient oublié que Mayotte contribuait à ce succès, ce que l’ouverture de la ligne directe Dzaoudzi-Paris leur rappelle actuellement sévèrement.
Car depuis le 10 juin, la donne aérienne de nos deux îles est en train de changer. Les Mahorais ne sont plus obligés de transiter par Saint-Denis (ni par Tananarive ou Nairobi) pour se rendre en métropole, grâce à liaison Dzaoudzi-Paris d’Air Austral. Résultat, le nombre de passagers de la ligne entre Mayotte et Saint-Denis est en forte chute: -23,3% en août, après une baisse de 20,1% en juillet et une autre de 22% en juin. Pour ce mois de juin, ce sont 3.200 passagers de moins qui ont emprunté la liaison par rapport au même mois de 2015. En juillet, 4.300 autres ont déserté la ligne.
En cascade, cette réorientation des flux de passagers mahorais commence à avoir des conséquences sur les vols entre La Réunion et Paris. Alors que la liaison progressait encore de 0,4% en juillet, elle accuse une baisse de 3,1% en août.
L’impact est donc maintenant bien réel: en août, le trafic passagers global de l’aéroport Roland-Garros a enregistré une baisse de 5,3%, qui fait suite aux reculs de juillet (-0,6%) et de juin.
Bons mois de juillet et d’août à Mayotte
«D’un point de vue statistique, La Réunion compte deux fois les passagers en provenance de Mayotte qui se rendent à Paris. Ils sont comptés au débarquement puis lorsqu’ils prennent le vol vers la métropole. Donc, rapidement, l’impact sur les chiffres peut être important», analyse Daniel Lefebvre, le directeur de la société d’exploitation de l’aéroport de Mayotte (SEAM).
Dans le même temps, à Mayotte, on a le sourire, même si ce n’est pas l’euphorie. Le premier semestre avait été décevant, avec une toute petite hausse de 0,2% du trafic et 146.601 passagers. Mais juillet et août ont été bons, avec par exemple 41.136 passagers au mois d’août en hausse de 1,7%.
Résultat, l’aéroport de Mayotte est à présent en progression de 1,3% depuis le début de l’année comparé à la même période de 2015, avec 224.381 passagers.
Les statistiques de la seule ligne directe ne sont pas encore connues, mais avec deux vols par semaines de 262 places, systématiquement complets à l’arrivée comme au départ, la liaison est un vrai succès commercial. A tel point qu’Air Austral a annoncé vouloir porter à trois vols hebdomadaires la ligne directe en basse saison et à 4 vols par semaine durant les prochains grands rushs.
Trouver une nouvelle croissance
Tous ces changements ne provoquent pour autant pas de panique à La Réunion. Depuis janvier, le nombre de passagers à l’aéroport de Saint-Denis est encore équivalent à celui de 2015 et la fréquentation des lignes vers la métropole progresse de 1,1%. Mais la plateforme aéroportuaire va devoir trouver de nouveaux leviers de croissance. L’enjeu est important car dans le même temps, le nombre de passagers locaux (commençant ou terminant leur voyage à la Réunion) a tendance à stagner, il a même diminué de 0,3 % en juillet.
C’est donc sur les lignes régionales vers Madagascar, Maurice, les Seychelles et l’Afrique du Sud que se trouvent les ressorts d’un nouveau décollage. Les liaisons vers l’Asie sont également prometteuses, avec Bangkok (+8,7% en juillet mais en recul depuis le début de l’année), la Thaïlande (+56,8% en juillet) ou encore l’Inde. La signature ce jeudi d’un accord de partage de codes entre Air Austral et Air India pourrait d’ailleurs booster la liaison entre La Réunion et Chennai.
RR
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