Avec 45 affaires programmées ce mercredi au tribunal correctionnel de Mamoudzou, la journée s’annonçait chargée pour les juristes. Elle l’aura été pour d’autres raisons.
Tôt le matin, les avocats ont mis en oeuvre le blocage du tribunal décidé discrètement la veille en assemblée générale. Une manière de suivre le mouvement national en durcissant une grève qui dure depuis plusieurs semaines.
“On bloque le tribunal, cela fait un mois que les audiences sont suspendues mais aujourd’hui on a choisi une méthode plus forte que d’habitude pour se faire entendre” explique Me Andjilani. “C’est notre façon de montrer qu’on n’est pas d’accord avec la façon de faire du gouvernement”.
Jusqu’à environ 10h30, les avocats qui avaient dressé un barrage de bric et de broc ont réussi à empêcher l’accès du TGI au personnel mais aussi aux gendarmes venus conduire des prévenus détenus. Un gendarme et plusieurs magistrats sont entrés en escaladant un grillage du palais de justice.
A 10h30, la police est intervenue pour lever le barrage, sans heurts. Les fonctionnaires ont retiré un à un les obstacles dressés sur le chemin du parking du tribunal puis écarté les avocats qui ont mené une brève résistance passive, accusant notamment de “voie de fait” les fonctionnaires qui essayaient de les pousser sur le côté.
Des revendications “légitimes”
Une demi-heure plus tard, les avocats décidaient la poursuite de la grève (sans blocage) et l’audience correctionnelle reprenait, sans les personnes convoquées. “Le mouvement a pris une tournure inhabituelle, a constaté Philippe Ballu, le président d’audience, notant que “cela pose un certain nombre de problèmes puisque les justiciables ne sont pas là”.
Les trois juges ont donc entrepris de renvoyer une à une les affaires du jour.
Si les avocats étaient les seuls en grève ce jour, ils ne sont pas les seuls à s’inquiéter de la réforme en cours, qui prévoit la suppression de tribunaux d’instance, et fait redouter une justice plus éloignée des citoyens. Des greffiers et magistrats ont exprimé leur soutien. “Les magistrats n’ont pas le droit de grève, a notamment expliqué le président du tribunal de Mamoudzou Laurent Sabatier, mais peuvent renvoyer les affaires pour signifier leur solidarité. Il y a au niveau national un certain nombre de revendications qui sont légitimes, c’est ma position” concluait-il sobrement.
Y.D.
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